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Avis 2024/08

 

Avis n° 2024/08 du Conseil Supérieur National des Personnes Handicapées (CSNPH) relatif au rapport final du Plan d’action fédéral handicap 2021-2024.

Rendu en séance plénière du 15 avril 2024.

Demande d’avis de madame Karine Lalieux, Ministre des Pensions et de l’Intégration sociale, chargée des Personnes handicapées, de la Lutte contre la pauvreté et de Beliris.

 

1. AVIS DESTINÉ

  • Pour suite utile à Madame Karine Lalieux, Ministre des Pensions et de l’Intégration sociale, chargée des Personnes handicapées, de la Lutte contre la pauvreté et de Beliris
  • Pour suite utile à tous les Ministres et Secrétaires d’état fédéraux
  • Pour information à Monsieur Alexander De Croo, Premier Ministre
  • Pour information à Unia
  • Pour suite utile au Mécanisme de Coordination de l’UNCRPD
  • Pour information au Médiateur fédéral
 

2. OBJET

En juillet 2021, le Plan d’action fédéral handicap (2021-2024) a été approuvé par le Conseil des ministres. Avant son approbation, le CSNPH avait rendu l’avis 2021/25.

Ce plan a ensuite donné lieu à un rapport intermédiaire fin 2022, au sujet duquel le CSNPH a rendu l’avis 2022/29.

Le présent avis concerne le rapport final sur la mise en œuvre du Plan d’action.

 

3. ANALYSE

145 mesures étaient prévues, 111 d’entre elles nécessitaient une mise en œuvre ponctuelle et 34 une mise en œuvre en continu.
Parmi les mesures ponctuelles, 82 ont été intégralement mises en œuvre et 15 partiellement, ce qui correspond à un taux de réalisation de 74 %.
Parmi les mesures continues, l’engagement n’a été totalement respecté que pour 21 mesures, et en partie pour 9 mesures, ce qui signifie que les engagements ont été respectés à 62 %.

Sur les 145 mesures, 105 visent directement les personnes en situation de handicap et leurs organisations représentatives, bien que le CSNPH n’ait été consulté que pour 67 mesures.

Dans l’avis 2022/29, le CSNPH avait déjà signalé différentes lacunes du Plan d’action fédéral handicap (mesures qui manquent d’ambition ou objectifs flous) et du processus de consultation (pas de consultation du CSNPH, ou consultation trop tardive pour la forme, etc.).

Étant donné qu’il s’agit ici d’un rapport final, nous ne repasserons pas en revue chaque mesure. L’accent sera mis sur certaines réalisations (A), sur les mesures suscitant encore des questions (B) et sur ce qui a (parfois manifestement) échoué (C). Néanmoins, un certain nombre de mesures importantes sont encore planifiées pour 2024, au sujet desquelles le CSNPH exprimera ses attentes (D). Nous conclurons cet avis par quelques points d’attention pour l’avenir (E).

 

4. AVIS

A. Certaines réalisations :

Mesures concernant le calcul des allocations aux personnes handicapées (8, 9 et 38) :

Des avis ont déjà été rendus au sujet de l’abolition du prix de l’amour et du prix du travail (avis 2020/23 , avis 2021/17 et avis 2021/35). Il s’agissait de mesures majeures étant donné l’historique législatif. Pour beaucoup de personnes en situation de handicap qui ne travaillent pas, le prix du travail n’est qu’une timide avancée.

Le relèvement de l’allocation de remplacement de revenus (ARR) au niveau du seuil de pauvreté a également constitué un petit pas en avant, mais est loin d’être suffisant pour garantir une existence digne.

Ainsi, le CSNPH continue de recevoir beaucoup de questions de personnes préoccupées qui perçoivent une ARR bien inférieure, voire plus d’ARR du tout, parce qu’elles cohabitent avec leur conjoint. Voici par exemple ce que dit un parent inquiet : « Il en résulte que [notre fille] n’a plus droit qu’à l’allocation d’intégration(AI). Cela signifie qu’elle doit affronter l’avenir avec à peine 400 euros par mois. Son compagnon s’occupe non seulement des soins, mais doit également assumer toutes les charges financières. »

Les faibles abattements sur le revenu de remplacement inquiètent également de nombreuses personnes en situation de handicap. Voici les propos d’un conjoint préoccupé : « Bien que [mon conjoint] SOUHAITE travailler, ce n’est pas possible pour le moment et il s’en voit doublement pénalisé (et le reste de la famille avec lui…).
Les premières années après son accident, ses revenus professionnels ont été examinés et il a EFFECTIVEMENT bénéficié d’une AI/ARR, mais ces trois dernières années plus rien, car il ne PEUT pas travailler… »

⇒ Le CSNPH demande dès lors instamment une vaste réforme globale de la loi de 1987 relative aux allocations (voire sa réécriture par souci de clarté). Il est impératif que la réforme fasse partie de l’accord de gouvernement et qu’elle soit effectivement mise en œuvre au cours de la prochaine législature, de sorte que toutes les personnes en situation de handicap, et pas uniquement celles qui appartiennent à une certaine catégorie, puissent choisir où et avec qui cohabiter, et ce avec un maximum de sécurité financière.

Mesure 11 : AI forfaitaire

Dans son avis 2023/18, le CSNPH a indiqué qu’il considérait l’AI forfaitaire comme le seul moyen actuel de réduire l’injustice entre les personnes qui travaillent et celles qui ne travaillent pas. Malheureusement, la mesure n’a pas été soutenue lors du conclave budgétaire d’octobre 2023.

⇒ Conformément à ce constat, la réforme de la loi de 1987 doit viser à éliminer les contrastes criants entre les personnes qui peuvent encore travailler et celles qui ne le peuvent pas. Que ce soit en raison de leur handicap ou de la discrimination et des préjugés toujours fortement présents sur le marché du travail.

Mesure 19 concernant la modernisation des procédures de reconnaissance du handicap

Le déploiement des évaluations multidisciplinaires a été présenté au CSNPH lors de la séance plénière du 16 octobre 2023.
À l’époque, le CSNPH avait déjà fait savoir qu’il se réjouissait de ce progrès, mais que la question essentielle devait être le manque d’autonomie et non l’existence d’une ou plusieurs pathologies (ce qui sert actuellement de base à l’évaluation multidisciplinaire).

Par ailleurs, le CSNPH avait demandé instamment que d’autres profils soient également associés, comme des assistants sociaux par exemple. Cette question allait être examinée. Le CSNPH avait également souligné que le médecin ne devait plus être la figure centrale de l’évaluation ; l’expertise de l’équipe multidisciplinaire devait être reconnue.

 Comme demandé lors de la séance plénière du 16 octobre 2023, le CSNPH souhaiterait être tenu informé de l’évaluation des équipes prévue en mars 2024.

Mesure 35 : UNCRPD et traductions

La Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées (UNCRPD), les rapports et conclusions du Comité ainsi que les observations générales du Comité ont été traduits dans les 3 langues nationales.

Une version facile à lire et à comprendre (FALC) de la Convention est également disponible.

 Il manque encore la traduction en langue des signes, et ce, malgré la demande du Comité des Nations unies (observations finales 2014, point 52). Les observations générales, rapports et observations finales ne sont pas non plus disponibles dans un format facile à lire.

⇒ Par ailleurs, le CSNPH tient à souligner l’importance de mettre à disposition des documents politiques importants, comme le Plan d’action fédéral handicap, en langue des signes et en version FALC.

Mesure 40 et 63 : Jobcalc et le statut de travailleur indépendant

Le CSNPH est partisan d’un one-stop shop (ou guichet unique) auquel peuvent s’adresser les travailleurs salariés et les travailleurs indépendants en situation de handicap, ainsi que les employeurs. Pour de plus amples informations, voir l’avis 2023/14.

Le point de contact doit pouvoir fournir des informations sur les prestations fédérales et régionales, les primes, les possibilités sur le plan de l’emploi (reprise du travail formelle et informelle) et des études.

La mesure 63 prévoyait un régime de cotisation réduite pour les bénéficiaires de l’ARR qui exercent une activité indépendante limitée. Voir avis 2022/31. Cette mesure a été réalisée.

⇒ Le CSNPH croit au potentiel d’activation de la mesure, mais il faut investir beaucoup plus en matière de sensibilisation et d’accessibilité (et de rapidité de mise à disposition) de l’information afin d’accompagner les personnes en situation de handicap vers l’emploi.

⇒ Le CSNPH espère que l’inventaire des mesures existantes en faveur de l’emploi que prépare la CIM Handicap tiendra également compte de l’activité indépendante et des outils de simulation comme Jobcalc.

Mesure 41 : AR action positive

Le CSNPH est satisfait du suivi de l’AR du 11 février 2019 fixant les conditions de l’action positive. Cinq ans plus tard, les plans d’action établis se comptent malheureusement sur les doigts de la main et on attend toujours le premier rapport d’évaluation bisannuel.

⇒ Il est grand temps que le CSNPH soit rapidement impliqué dans les adaptations annoncées de l’AR.

Mesures 48-52 : personnes en situation de handicap et administration fédérale en tant qu’employeur

Le CSNPH salue les actions déjà entreprises et espère que les ambitions ne feront que croître et que les engagements se transformeront en résultats.

⇒ Le CSNPH estime nécessaire de responsabiliser les administrations/organismes qui n’atteignent pas les 3 % et/ou ne disposent pas d’un plan d’action handistreaming.

⇒ En outre, il est essentiel que des aménagements raisonnables soient apportés tout au long de la carrière et pas uniquement lors des sélections et de l’aménagement du poste de travail. Cela signifie qu’il faut investir beaucoup plus dans les aménagements raisonnables dans le cadre, par exemple, du processus d’apprentissage et de l’évolution du travailleur en situation de handicap.

⇒ Des dispositions doivent être prises afin d’assurer un accompagnement effectif et régulier des personnes en situation de handicap qui en ont besoin. Cet aspect doit aussi être prévu au niveau réglementaire dans les services publics.
La fonction d’accompagnateur doit être définie avec suffisamment de précision dans la description de fonction de la personne désignée, afin que celle-ci puisse consacrer assez de temps à l’accomplissement optimal de ce rôle.

Mesures 76-79 : climat et environnement – mesures de la Ministre Khattabi

Le CSNPH est satisfait des consultations rapides tenues par la ministre Khattabi. Comme le montrent les travaux relatifs à la transition juste, les populations vulnérables comme les personnes en situation de handicap souffrent déjà davantage des différentes crises. Sans mesures adéquates dans de nombreux domaines, ces inégalités existantes ne feront qu’augmenter, et ce sur le plan de la fracture numérique, de l’accès aux soins de santé, du pouvoir d’achat, de l’offre de produits accessibles, de l’accessibilité de la communication de crise, de la mobilité (capacité de se rendre quelque part de manière autonome, plans concernant les LEZ…), etc. Il est dès lors regrettable que les modalités de la poursuite de la collaboration avec le CSNPH sur le plan structurel dans le cadre de la mise en œuvre de la transition juste n’aient pas été précisées.

⇒ Les changements climatiques et environnementaux touchent donc de nombreux domaines. Le CSNPH demande à rester associé à la recherche et à la formulation de solutions.

Mesures 80-85 : accessibilité des bâtiments publics

Le CSNPH réclame depuis longtemps que les bâtiments publics soient rendus accessibles aux personnes en situation de handicap (voir avis 2015/34), non seulement les parties publiques, mais aussi les parties uniquement accessibles au personnel. En effet, des membres du personnel peuvent aussi être porteurs d’un handicap. Ces dernières années, ce sont surtout des actions préparatoires qui ont été entreprises : inventaire, plans d’action, guide d’accessibilité, désignation de personnes de référence, etc. À cet égard, n’oublions pas les nombreuses années d’efforts de monsieur Jean-Marc Helson (Régie des Bâtiments).

À présent, le moment est venu de rendre les bâtiments effectivement accessibles. C’est en premier lieu le rôle de la Régie des bâtiments (accessibilité générale) et en second lieu celui du service qui va occuper ou occupe les bâtiments (aménagement accessible, signalétique, etc.). Ce n’est que dans les années à venir que nous pourrons voir si l’accessibilité des bâtiments publics s’est effectivement améliorée.

 Le CSNPH demande à la Régie des bâtiments et aux organismes concernés de le tenir informé.

Mesures 95-101 : mobilité

Dans l’ensemble, le CSNPH entretient depuis de nombreuses années un dialogue constructif avec la SNCB, notamment par l’intermédiaire de son groupe de travail et d’autres réunions et consultations, par exemple en ce qui concerne la hauteur de quai unique, l’accessibilité des gares et les services d’assistance. La SNCB prend des mesures pour offrir une assistance plus rapide et de meilleure qualité aux personnes qui en font la demande. La SNCB a également écouté le secteur du handicap afin de rendre la nouvelle voiture M7 plus accessible aux personnes en situation de handicap. Pour le CSNPH, ces démarches pourraient être plus rapides et plus ambitieuses, mais il y a effectivement un net progrès.

L’étude sur l’usage de la European Disability Card (EDC) dans les transports ferroviaires (Mesure 98), notamment en ce qui concerne la dispense du tarif à bord (avis 2023/08) ou l’acceptation de l’argent liquide dans le train, n’a encore rien apporté de concret pour les personnes en situation de handicap. Nous espérons que ce sera bientôt le cas.

Le CSNPH déplore aussi que la SNCB ne l’ait pas toujours consulté, notamment lors de décisions opérationnelles dans le cadre du contrat de service public, comme pour l’adaptation (lisez : la réduction) des heures d’ouverture des guichets (avis 2024-04).

B. Sur les mesures suscitant encore des questions :

Mesure 24 : améliorer les tarifs sociaux existants 

Il y a un manque de clarté concernant l’automatisation du droit à l’offre internet sociale. Sur VRT-nieuws, la Ministre De Sutter a indiqué que c’était le cas ; c’est aussi ce qu’affirme Testachats. Cependant, le site officiel du SPF Économie contredit cette affirmation.

⇒ Les bénéficiaires potentiels doivent être identifiés et au moins contactés pour qu’ils soient informés de l’existence de cette offre.

Le CSNPH a entendu dire que certaines personnes craignaient de perdre leur ancien tarif social télécom (en raison du changement de plan tarifaire, de l’abandon de l’offre par l’opérateur, d’un déménagement, etc.).

⇒ Il est nécessaire d’améliorer l’information et de dresser une comparaison des abonnements afin de rassurer les personnes : l’ancienne réduction de 11,5 EUR ne sera certainement pas la «meilleure» option, ni la «moins chère», comparé à un prix maximum établi pour l’Internet fixe et les forfaits. Mais ces informations doivent également être communiquées aux citoyens de manière compréhensible.

Mesure 27 : handicap et Plan de lutte contre la pauvreté

Le CSNPH a rendu sur ce point l’avis 2021/34. Le Plan de lutte contre la pauvreté se contente de mentionner les personnes en situation de handicap, mais sans se concentrer de manière complète ou détaillée sur celles-ci et sur le risque accru de pauvreté auquel elles sont exposées. Le plan ne prévoit pas non plus d’actions spécifiques.

⇒ Dans le prochain Plan de lutte contre la pauvreté, il conviendra de prévoir une politique de handistreaming à part entièrequimette l’accent sur les risques de pauvreté spécifiques liés au handicap.

⇒ Comme demandé dans l’avis 2022/29, il faut assortir les actions d’indicateurs de suivi et impliquer davantage la plateforme Pauvreté, le Conseil national du Travail (CNT), le CSNPH,

Mesure 39 : allongement de la période de cumul de l’ARR et d’un revenu du travail

Le CSNPH a rendu l’avis 2023/20 sur la mesure concernant une période de cumul de l’ARR et de revenus du travail pour les personnes qui ne disposaient pas de revenus du travail 2 années avant la mise au travail. Dans la version néerlandaise définitive de l’ AR du 31 janvier 2024, la mesure a cependant été formulée différemment : il était question de « vierentwintig maanden voorafgaand aan de werkhervatting ». Dans la version FR du texte, il était bien indiqué : « avant sa (re) mise au travail ».

Le 11 avril, le CSNPH a reçu une demande d’avis de la DG Personnes handicapées (DG HAN) concernant la correction de cette erreur linguistique. Voir à ce sujet l'avis 2024/11.

Mesure 86 : amélioration de l’accessibilité des institutions culturelles 

Le CSNPH se réjouit d’apprendre que Bozar a pris des mesures en la matière.

Le CSNPH regrette cependant qu’il n’y ait pas de site web où les personnes en situation de handicap puissent chercher les musées qui leur sont accessibles en fonction de leurs besoins d’assistance. Actuellement, il faut regarder musée par musée le type d’assistance proposé, ce qui est compliqué. Il serait également utile d’inclure non seulement les musées fédéraux, mais aussi ceux des entités fédérées.

Il serait encore bien plus pratique que ce moteur de recherche ne comprenne pas uniquement des musées, mais aussi des infrastructures sportives, des salles de théâtre et de cinéma, des plaines de jeux et d’autres lieux de loisirs.

Cette mesure pourrait s’inscrire dans le cadre de l’optimisation du site web de l’EDC. Il est déjà possible de filtrer la recherche en fonction de grandes catégories d’« aide » (ex. réduction, accès prioritaire, équipements adaptés, etc.), mais pas encore en fonction de besoins d’assistance spécifiques (ascenseur, plans inclinés, plaques tactiles, langue des signes, FALC, guides spécialisés, etc.).

Mesure 102 : réforme du système des cartes de stationnement

Le CSNPH suit les travaux menés en vue de trouver une solution au problème des scan cars qui verbalisent à tort les titulaires d’une carte de stationnement pour personnes handicapées. Une solution accessible et rapide a été annoncée, mais le CSNPH se pose encore une série de questions (voir avis avis 2024/03). Les communes sont libres de participer au projet ou non et de définir leur propre politique en matière de stationnement. Le CSNPH plaide pour une politique uniforme pour l’ensemble des communes.

Mesure 105 : tarification des services des administrateurs professionnels 

Le 1er décembre 2023, le Ministre de la Justice, Paul Van Tighelt, a demandé un nouvel avis sur l’avant-projet d’AR concernant les revenus pris en considération pour déterminer la rémunération des administrateurs professionnels.
Le CSNPH a rendu à ce sujet l’avis 2023/28.

Le CSNPH avait déjà été consulté par le Ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne le 6 janvier 2022 et avait alors rendu l’avis 2022/08.

⇒ Les deux avis indiquent clairement que les allocations sont destinées à compenser les conséquences d’un handicap ou d’une réduction d’autonomie, et ne peuvent jamais être considérées comme des revenus.

L’AR n’a pas encore été publié au Moniteur belge et le CSNPH espère dès lors que sa revendication sera encore prise en compte.

Mesure 140 concernant la promotion de l’image de la Belgique à l’étranger 

Le CSNPH aimerait voir plus d’engagement en matière de conférences directement liées au handicap, par ex. la COSP de l’UNCRPD.

C. En ce qui concerne les échecs :

Mesures 1 et 2 axées sur les plans d’urgence et la communication de crise

Bien que la crise sanitaire du covid-19 et les inondations de 2021 aient montré que la Belgique était/est mal préparée aux situations de crise, l’approche des plans d’urgence n’a pas été une priorité de cette législature. Pour le moment, seul existe le système BE-Alert, auquel les citoyens peuvent souscrire pour être informés en cas d’urgence (par SMS, message vocal téléphonique ou e-mail) par les autorités (locales), des événements qui se sont produits et ce qu’ils peuvent faire pour leur propre sécurité.

Il n’existe toujours pas de plans actifs visant notamment à mettre en sécurité les personnes en situation de handicap qui se sont inscrites.

Bien qu’il ait insisté à de nombreuses reprises pour être impliqué dans les réformes, le CSNPH n’a jamais été consulté.

Le CSNPH est déçu de n’avoir toujours pas été consulté en ce qui concerne la communication de crise.

Mesures 4, 29, 32 et 33 relatives à la langue des signes et aux versions FALC de documents :

Si l’utilisation d’un langage simple dans les soins de santé est importante, comme l’a souligné le KCE, la disponibilité de contenus en langue des signes l’est tout autant.
Vu l’importance de la communication et du traitement d’informations dans les soins de santé en général et pour les personnes en situation de handicap en particulier, le CSNPH regrette que la mesure 4, relativement simple, n’ait pas été mise en œuvre.

⇒ Ainsi, il n’y a toujours pas de directives en matière d’emploi de la langue des signes et d’un langage simplifié pour l’administration fédérale en général, alors que les services publics concernent l’ensemble des citoyens et doivent donc communiquer de manière accessible.
Comme demandé dans l’avis 2022/29, il est nécessaire que la langue des signes soit non seulement prévue lors des conférences de presse, mais aussi dans le cadre des contacts entre l’administration et les personnes utilisant la langue des signes, qui est souvent leur langue maternelle.

⇒ Il est urgent d’investir dans la promotion de la formation d’interprètes en langue des signes. Un problème à aborder lors de la CIM correspondante ?

Mesure 5 et la problématique des conditions préexistantes 

Fin 2023, le CSNPH a été informé que, si le dossier ne progressait pas depuis aussi longtemps, c’était parce qu’il n’était pas établi avec certitude que les titulaires d’une AI soient désavantagés en matière d’assurance maladie compte tenu du seuil de cumul peu élevé. Le problème se poserait surtout pour les travailleurs « irréguliers », pour lesquels l’indemnité de l’INAMI serait pratiquement égale à une ARR.

Début 2024, la DG HAN a confirmé que ce n’était pas possible en vertu de l’art. 9ter, §5, de l’AR ARR/AI. Une première réunion a également eu lieu avec l’INAMI.

⇒ Il est regrettable que la question ait été soulevée si tardivement dans la législature. Le CSNPH espère que la recherche d’une solution ne sera pas enterrée en raison de la fin de la législature.

Mesure 12 : pension pour inaptitude physique pour les fonctionnaires

La pension pour inaptitude physique pour les fonctionnaires se modernise et devient une « allocation d’inactivité ». La pension pour inaptitude physique était aux prises avec le « prix de l’adversité » : diminution du revenu, perte de l’AI en raison du renvoi au régime de revenus de remplacement, perte de l’intervention majorée pour les frais médicaux et perte des droits dérivés.

⇒ La réforme est en cours, mais à ce jour (15/04/24), le CSNPH constate que le prix de l’adversité ne disparaîtra avec cette nouvelle allocation d’inactivité.

Mesures 28 et 30 : plan global de modernisation des services publics + inclusion handicap

Le CSNPH déplore l’absence de plan global et d’inventaire exhaustif des initiatives prises par les différentes administrations.

Le CSNPH constate que la collecte d’informations des différentes administrations et le suivi de l’avancement des mesures du Plan d’action fédéral handicap sont parfois laborieux.

⇒ Vu que l’objectif est d’ancrer légalement le plan d’action fédéral, le CSNPH espère que l’on s’attellera à mettre en place une procédure de reporting spécifique avec désignation des points de contact, fixation des échéances en matière de reporting ainsi qu’une plateforme où les personnes concernées et leurs ayants droit puissent suivre l’évolution des mesures et savoir à qui s’adresser pour obtenir plus d’informations.

Mesure 91 concernant l’accessibilité des terminaux de paiement portables ne disposant que d’un pavé tactile 

Les pavés tactiles ne sont pas accessibles aux personnes aveugles et très malvoyantes. Il est regrettable que ce dossier n’ait pas constitué une priorité pour les ministres compétents et que l’étude prévue n’ait toujours pas été réalisée.

D. En ce qui concerne les mesures encore planifiées

Le CSNPH indique qu’un avis formel a été rendu par le CSNPH ou lui sera demandé en 2024 concernant 37 mesures. Le 15 avril, le CSNPH a encore reçu 6 demandes d’avis. Le CSNPH souligne que le gouvernement passera en affaires courantes dans moins d’un mois et que des modifications réglementaires ayant un impact financier ne seront plus permises. Il rappelle dès lors la nécessité d’être impliqué dès le début de la discussion. En effet, une demande d’avis pour la forme n’a pas grande utilité.

Mesure 3 concernant les problèmes de répartition des compétences en matière de santé publique (nomenclature kinésithérapie/logopédie liée aux centres de revalidation) 

Selon le rapport final, une solution aurait été trouvée pour l’accès à la logopédie aux personnes ayant un QI inférieur à 86. Ce n’est que partiellement vrai, car le seuil de QI n’est qu’un côté de la médaille. Comme l’indique le communiqué de presse du ministre Vandenbroucke lui-même : « Lorsque le QI d’un enfant est à ce niveau, il est prévu qu’il puisse aller dans un CRA et dans l’éducation spécialisée. » Ainsi, il y est presque littéralement dit que ces enfants fréquentent souvent l’enseignement spécialisé. De ce fait, en vertu de l’art. 36, § 3, 1°, ils restent exclus du remboursement, car cette exception n’est actuellement pas prise en compte.

Pour de plus amples informations, voir avis 2023/21.

 Le CSNPH exige que l’étude que le KCE doit mettre sur pied s’attache à la situation dans son ensemble et pas uniquement au seuil de QI. Il convient de prendre en compte toutes les circonstances pertinentes : enseignement spécial, centres de revalidation, places disponibles dans ceux-ci et listes d’attente, répartition géographique, absence de facto de logopèdes, libre choix du prestataire de soins, possibilités d’adaptation des enfants, chevauchement du seuil de QI et de l’exclusion de l’enseignement spécial, etc.

Mesures 15 et 18 : réforme de la loi de 1987 relative aux allocations

Le CSNPH se réjouit de voir qu’un rapport sur les formes de cohabitation est attendu dans le courant de l’année 2024 et que différents scénarios de réforme seront préparés d’ici fin 2024. Jusqu’à présent, le CSNPH n’a pas encore été impliqué dans ces travaux et c’est pourquoi il demande avec insistance d’y être associé dans les plus brefs délais.

⇒ La contribution du CSNPH peut déjà être utile dans la phase de brainstorming. L’implication du CSNPH en amont, plutôt que lorsque la mesure est déjà soumise pour accord, est la meilleure garantie d’un feedback constructif.

E. Quelques points d’attention pour l’avenir en guise de conclusion :

⇒ Utilité du Plan d’action fédéral handicap
Le handistreaming ne peut pas être simplement prévu dans une loi ; il exige une analyse proactive, un projet, une mise en œuvre, un suivi et une évaluation des mesures. Sans plan et sans monitoring, il ne peut être véritablement question de handistreaming.

⇒ Contenu du Plan d’action fédéral handicap
Le plan actuel comprenait 30 mesures axées sur la modification de la réglementation. C’est très peu comparé à l’ensemble de la réglementation existante. À la lumière de la Convention des Nations unies (UNCRPD) et surtout de l’art. 22ter (encore relativement nouveau) de la Constitution, il revient au législateur de confronter la législation existante aux principes d’inclusion, d’aménagements raisonnables et d’autonomie et d’y apporter au besoin des modifications. Il est essentiel que les personnes en situation de handicap « sentent » réellement la manière dont la société évolue vers plus d’inclusion, et ce, notamment par l’adoption massive d’une réglementation inclusive.

Le CSNPH souhaiterait être associé dès le début à la rédaction du prochain Plan d’action.

Il serait préférable de motiver le choix de certaines mesures (politiquement, scientifiquement), afin de susciter la compréhension et le soutien des personnes en situation de handicap, des acteurs de terrain, mais aussi des autres organismes compétents. Cela augmenterait les chances de réussite de ces mesures.

Il serait aussi intéressant d’impliquer des experts du vécu et des spécialistes dès la phase de sélection des mesures et d’organiser un débat afin de voir quelles sont les mesures vraiment pertinentes aujourd’hui pour des problèmes urgents, et celles qui concernent l’avenir à long terme et dépassent donc la durée de la législature.

⇒ Volonté de handistreaming de la part des cellules stratégiques
Les cellules stratégiques doivent être disposées à intégrer la dimension du handicap dans leur fonctionnement quotidien. Chaque cellule stratégique doit ainsi désigner un interlocuteur en matière de handicap, qui doit avoir une connaissance suffisante de l’inclusion et de la portée des droits des personnes en situation de handicap. Cet interlocuteur doit non seulement entretenir des contacts internes et évaluer si les différentes mesures nécessitent un avis du CSNPH, mais aussi être en contact avec les autres interlocuteurs extérieurs, le CSNPH, Unia, etc.

⇒ Reconnaissance du rôle du CSNPH
Le rôle du CSNPH est de plus en plus reconnu. Malheureusement, la consultation du CSNPH est encore loin d’être structurelle, mais plutôt sporadique et arbitraire. Par ailleurs, il n’est encore trop souvent fait appel au CSNPH que dans la dernière phase de l’élaboration des mesures.

Il est aussi surprenant que des «organisations sociales» aient été consultés sur un grand nombre de mesures du Plan d’action fédéral handicap, mais pas le CSNPH. À l’avenir, le CSNPH devrait toujours être au minimum consulté : il ne dispose peut-être pas d’une expertise spécialisée dans tous les domaines, mais il peut toujours renvoyer si nécessaire vers des personnes ayant cette expertise.

⇒ Le secrétariat du CSNPH 
Le secrétariat du CSNPH doit disposer des moyens nécessaires afin de fonctionner de manière efficace. L’équipe actuelle ne suffit pas pour préparer les avis, à suivre les réunions et à représenter le conseil là où c’est nécessaire. Il a besoin de plus de personnel qu’il n’en dispose actuellement. En particulier si le déploiement du handistreaming se poursuit et si le CSNPH est amené à rendre plus d’avis à l’avenir.

⇒ Besoin de données et de statistiques
La nécessité de disposer de données et de statistiques pour élaborer des politiques fondées commence à être de plus en plus reconnue, et la collecte et l’analyse de ces données ont pris un bon départ ces dernières années. La maintenance de ces données doit être structurelle pour les mesures importantes (comme le droit de vote des personnes en situation de handicap, les personnes qui séjournent en institution, les mesures en matière d’emploi, les statistiques concernant les loisirs qui sont actuellement quasi inexistantes mais peuvent être pertinentes sous l’effet de l’EDC, etc.). Cette maintenance nécessite une approche coordonnée avec les entités fédérées.

Les données déjà disponibles doivent être affinées et être réellement utilisées pour l’élaboration de la politique.

⇒ Nécessité d’une communication adaptée pour et envers les personnes en situation de handicap
La crise du covid et les inondations de 2021 ont clairement montré que la communication devait être adaptée dans tous les services publics. Il s’agit d’un point d’attention important dont il faut tenir compte lors du développement de toutes les mesures et actions du prochain gouvernement. Le CSNPH entend y être associé dès le début.

 Importance du suivi et de l’évaluation des actions et de la politique
Pour le CSNPH, le développement implique aussi des indicateurs de suivi et des évaluations intermédiaires.

Ces éléments sont essentiels pour garantir la mise en œuvre de l’UNCRPD en Belgique, au-delà des législatures et des domaines.