aller au contenu

Avis 2020/21


Avis n° 2020/21 du Conseil Supérieur National des Personnes Handicapées (CSNPH) relatif au Rapport des formateurs du 30 septembre 2020, rendu en séance plénière du 19/10/2020

Avis rendu d’initiative par le CSNPH


1. OBJET

Le 30 septembre 2020, les deux formateurs du gouvernement fédéral ont publié un Rapport. Ce Rapport sert de base à la formation du nouveau gouvernement fédéral. Le CSNPH a relevé les éléments qui concernent directement ou indirectement les personnes handicapées et souhaite attirer l’attention des membres du gouvernement sur différents points.


2. ANALYSE

A. Crise Covid

Le gouvernement désignera un commissaire mandaté pour une période de douze mois, soutenu par une équipe afin d’assurer la coordination des politiques de santé entre le niveau fédéral et les entités fédérées.

Pour éviter la lassitude face au coronavirus, un nouveau contrat avec le citoyen, les entreprises et les institutions est nécessaire. Les mesures devront être compréhensibles, vécues comme sensées et garantissant la viabilité sociale.

Il faudra faire face à une nouvelle vague épidémique et déterminer comment il faudra intervenir. Les soins de première ligne, les maisons de repos (et de soins) et les autres établissements de soins pourront compter sur des équipes (hospitalières) mobiles.

Un groupe de travail interfédéral et multidisciplinaire sera chargé d'évaluer et de mettre à jour les plans d'urgence existants (approvisionnement énergétique, approvisionnement alimentaire, catastrophes alimentaires, ozone et chaleur, maisons de repos, nucléaire, etc.). Le groupe de travail examinera également quels plans d'urgence supplémentaires seraient opportuns.

B. Soins de santé

L’objectif est de réduire, d’ici 2030, de minimum 25% les inégalités de santé entre les personnes les plus favorisées et les moins favorisées en matière d’espérance de vie en bonne santé, de réduire le taux de mortalité évitable de 15%. C'est pourquoi le gouvernement développera une autorité de données de santé chargée du développement et de la mise en œuvre d'une stratégie.

Le gouvernement veut combattre les maladies mais aussi faire de la prévention, en encourageant les examens de contrôle préventifs (e.a. soins dentaires, soins diététiques, soins de santé mentale, patients à risque, etc.). Il souhaite aussi développer un plan interfédéral « maladies chroniques ».

La loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux fera l’objet d’une réforme approfondie sur la base des nouvelles connaissances dans le domaine des soins de santé et de la justice. Le travail préparatoire mené lors de la précédente législature par un groupe mixte justice-SSM (soins de santé mentale) servira de base à cet égard. Dans ce cadre, il sera demandé aux experts de développer une approche pour diminuer l’impact sur les enfants de la dépendance grave des parents et parents en devenir.

La révision de la législation sur les professions des soins de santé (loi de 2015 relative à l’exercice des professions des soins de santé) sera poursuivie et modernisée. Les actes seront confiés aux prestataires de soins de santé qui peuvent les exercer de la manière la plus efficace et de la plus qualitative possible.

C. Sécurité sociale

 La sécurité sociale fera l'objet d'une modernisation en profondeur, en collaboration avec les partenaires sociaux. Les points suivants seront abordés :

  • une sécurité sociale orientée vers l’avenir ;
  • une sécurité sociale pérenne ;
  • une culture de monitoring et d’évaluation ;
  • une sécurité sociale forte et efficace ;
  • un marché du travail inclusif ;

Le gouvernement luttera également contre la fraude sociale dans les régimes d’allocations et contre le travail au noir dans les systèmes de prestations.

Afin d'augmenter la durée effective de carrière des salariés, des mesures seront prises concernant les modalités de fin de carrière. Ceci peut être réalisé, entre autres, par la pension à temps partiel, les pistes d'atterrissage en douceur, la formation et la réorientation tout au long de la carrière, et en favorisant le transfert de savoir-faire entre les générations de salariés.

Le régime obsolète de la pension de maladie des fonctionnaires invalides sera évalué, en particulier pour les fonctionnaires qui sont encore loin de

l'âge de la retraite, et sera davantage aligné sur le régime d'invalidité et le régime associé des processus de réintégration qui existent parmi les employés.

D. Etat et fonction publique

 Le gouvernement s’engage à réduire les charges administratives pesant sur les citoyens et les entreprises, notamment en améliorant les services numériques, en débloquant et en développant davantage les applications d'administration en ligne (e‑government) tout en respectant les principes « only once » et « think small first ». Il s’engage également à ce que les services publics restent accessibles à tous, y compris aux citoyens ayant peu de compétences numériques, de faibles revenus ou un handicap.

Le gouvernement va promouvoir l'utilisation de l’EDC (European Disability Card) auprès des autorités locales et veillera à ce que la carte soit également mieux connue des services publics et de la police. Il veut aussi numériser et innover dans les soins de santé et améliorer les infrastructures et la mobilité.

Il veut aussi étendre considérablement les paiements électroniques (réduire de manière drastique d’ici la fin de la législature les paiements en espèce).

Un plan ambitieux de lutte contre la pauvreté sera élaboré en concertation avec les organisations de lutte contre la pauvreté, les entités fédérées, et d’autres parties prenantes. Ce plan est basé sur plusieurs principes, parmi lesquels l’amélioration du revenu des ménages dans la pauvreté et le recours aux droits et l’emploi durable en tant que levier très important pour la réduction de la pauvreté.

Il sera examiné si la réglementation sociale et fiscale est encore adaptée aux formes actuelles de vie commune.

Le gouvernement consentira des efforts supplémentaires pour atteindre son objectif d'au moins 3 % d'emplois de personnes en situation de handicap dans les services publics, notamment via ses politiques de recrutement et d'environnement de travail.

E. Plan de relance

Un plan de relance et transition interfédéral sera mené, et devra donner un électrochoc au pays. Cela doit se faire avant tout par la création d'emplois. Avoir un emploi de qualité est la meilleure protection sociale contre la pauvreté et pour la sécurité d'existence.

Un plan d'investissement interfédéral doit être établi pour concrétiser cette démarche et moderniser nos outils afin que notre pays reste compétitif et prospère. Le plan d’investissements s’inscrira dans la continuité des différents domaines, précédemment définis dans le Pacte national d’Investissements stratégiques, notamment :

  • la numérisation et l'innovation dans les soins de santé ;
  • la transition énergétique ;
  • l'amélioration de nos infrastructures et de la mobilité ;
  • l'enseignement et la recherche universitaire ;
  • l’agenda numérique,…

Le gouvernement se fixe comme objectif d’étendre considérablement les paiements électroniques. Le consommateur doit toujours avoir la possibilité de payer de manière électronique. Les plafonds pour le paiement sans contact seront à nouveau augmentés. Dans ce cadre, les organisations patronales, les organisations de protection des consommateurs et les banques seront consultées. L’objectif n’est pas de supprimer complètement les paiements en espèces, mais le gouvernement entend les réduire de manière drastique d’ici la fin de la législature.

F. Lutte contre la pauvreté et accès aux droits

Un plan ambitieux de lutte contre la pauvreté sera élaboré en concertation avec les organisations de lutte contre la pauvreté, les entités fédérées et d’autres parties prenantes.

Le gouvernement prévoit des augmentations des allocations sociales en direction du seuil de pauvreté et des systèmes de soutien financiers complémentaires (ex. REMI – budget de référence).

Il veut aussi poursuivre les efforts d’automatisation et de lutte contre le non take-up.

Les droits sociaux seraient octroyés sur base des revenus et non du statut.

Il veut améliorer le revenu des ménages dans la pauvreté et le recours aux droits et assurer des emplois durables (levier très important pour la réduction de la pauvreté).

Pour les droits qui ne peuvent pas être octroyés automatiquement, un outil numérique indiquant aux travailleurs sociaux sur la base du statut, du revenu, du domicile et de la situation de famille, à quelle aide locale et supralocale un ménage a droit, sera proposé.

Un examen de la réglementation sociale et fiscale par rapport aux formes actuelles de vie commune (dont les nouvelles formes de cohabitation et solidarité comme l'habitat intergénérationnel), et/ou de soins et aux choix de chacun est aussi prévu, tout comme la modernisation de l'attribution des allocations et soutien à la DG Personnes handicapées (DG HAN) et le renforcement du caractère multidisciplinaire de l'évaluation médicale.

G. Marché du travail

Le chômage temporaire pour force majeure est utilisé comme alternative à une nouvelle prolongation du congé parental corona, sur la base d'un certificat spécifique de quarantaine, pour les parents d'enfants en âge scolaire, les enfants en crèche et les enfants handicapés en établissement, lorsqu'ils ne peuvent être pris en charge qu'à domicile en raison du COVID-19.

Les personnes non actives sur le marché du travail sont encouragées et aidées à faire le pas vers un emploi. Il s’agit notamment des personnes percevant un revenu d’intégration sociale, des malades de longue durée et des personnes porteuses d’un handicap. Les obstacles à l’emploi et au fait de travailler davantage seront également levés. Le gouvernement renforcera la concertation et la coopération avec les entités fédérées (en ce compris la CIM (Conférence interministérielle) et le Conseil Supérieur National des Personnes Handicapées).

Pour les personnes porteuses d’un handicap, le fil conducteur de la politique est la Convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées.

Pour les personnes porteuses d’un handicap, les seuils financiers pour pouvoir travailler (à temps partiel) seront supprimés. Le gouvernement mettra en œuvre pour ce groupe cible un système de reprise du travail volontaire s’inspirant de celui de l’assurance incapacité de travail et s’attachant à la spécificité du groupe cible. Le gouvernement soutiendra également l'esprit d'entreprise chez les personnes en situation de handicap et facilitera le démarrage d'une activité indépendante, notamment en abaissant spécifiquement pour ce groupe les conditions financières d’accès au statut social des indépendants.

L'organisation et la gestion des processus de réintégration seront évaluées. Les procédures seront simplifiées et alignées afin qu'un plus grand nombre de travailleurs puissent entamer et mener à bien un processus de réintégration (plus rapidement). Ce parcours est basé sur une approche multidisciplinaire impliquant les services de l'emploi en temps utile.

Il faut apporter aide et conseil aux entreprises et aux travailleurs pour qu’ils entament et mènent à bien les parcours de réintégration.

Le gouvernement accordera une attention particulière à la lutte pour la diversité et contre toutes les formes de discrimination.

Le gouvernement lance une consultation avec les partenaires sociaux sur la simplification, l'harmonisation et l'optimisation des différents systèmes de congés, en accordant une attention particulière aux motifs de congé liés aux soins et à la conciliation de la vie professionnelle et familiale.

H. Entreprises publiques

En ce qui concerne bpost, le gouvernement adaptera le cadre postal et le contrat de gestion relatif au service postal universel aux besoins changeants des citoyens et des entreprises. Pour cela, il tiendra compte de plusieurs objectifs et des citoyens les plus vulnérables dans la transformation numérique.

I. Pouvoir d’achat

La pension minimum sera progressivement relevée (carrière complète et incomplète) vers 1500 euros nets pour une carrière complète.

Les allocations les plus basses seront progressivement augmentées en direction du seuil de pauvreté.

Des modalités spécifiques seront prévues pour éviter les pièges à l’emploi. Pour les personnes en situation de handicap, le prix de l'amour et le prix du travail seront encore réduits afin de pouvoir participer pleinement à la société.

Le travail (supplémentaire) devra toujours être financièrement intéressant pour la personne concernée et sa famille.

Le gouvernement veillera à ce que l'accès aux services bancaires de base ne reste pas lettre morte pour les groupes vulnérables qui ont besoin de services adaptés, comme les personnes en situation de handicap, les personnes âgées ou les personnes qui n'ont pas d'accès numérique aux services bancaires.

Le gouvernement prendra des mesures pour améliorer le droit à l’oubli dans la législation sur les assurances. Il examinera si et dans quelles conditions la liste des maladies chroniques peut être encore complétée. Le gouvernement examinera comment le droit à l’oubli peut être étendu à d'autres assurances liées à la santé.

Le gouvernement étudiera la possibilité de permettre aux consommateurs qui bénéficient du tarif social des télécommunications de choisir des services mobiles au lieu de services fixes.

J. Justice et sécurité

Le fonctionnement de la justice doit être rendu plus efficace, plus accessible et plus compréhensible. Le gouvernement évaluera également les possibilités d’améliorer l’accès et la qualité de l’aide juridique offerte aux publics vulnérables qui font face à une multitude de problèmes juridiques et sociaux.

Des capacités adaptées seront nécessaires dans les centres de psychiatrie légale et les prisons. Dans la mise en œuvre des masterplans, la première priorité ira à la construction des nouveaux centres de psychiatrie légale (Alost, Paifve et Wavre). Dans l'évaluation des masterplans, il sera tenu compte du fait que les internés ne sont pas à leur place dans le milieu carcéral.

K. Fiscalité

Le gouvernement prépare une large réforme fiscale afin de moderniser, simplifier et rendre le système fiscal plus équitable et plus neutre. De cette manière, cette réforme répondra aux engagements du gouvernement repris dans le présent accord gouvernemental, notamment en ce qui concerne la lutte contre la pauvreté et le soutien aux familles.

Le supplément de quotité de revenu exemptée d’impôt pour la garde de proches (grands-)parents et frères/sœurs à charge de plus de 65 ans sera augmenté.

L. Energie

Une facture énergétique abordable est essentielle pour les citoyens et les entreprises.

M. Mobilité

Ce gouvernement consentira des investissements supplémentaires dans les chemins de fer. Ils se concentreront sur :

  • l’achat de nouveau matériel roulant ;
  • la modernisation, la maintenance, l’accessibilité et la multimodalité des gares ;
  • l’accessibilité des trains et des quais. Le gouvernement s’engage à accélérer les travaux de rehaussement des quais et raccourcit la période de réservation pour une assistance. Toute gare accueillant plus de 5 000 passagers par jour sera ainsi mieux accessible d'ici à 2024. Le nouveau matériel ferroviaire acheté par la SNCB sera accessible aux personnes en situation de handicap. L'accessibilité actuelle sera évaluée et, sur cette base, un plan d'action échelonnée pour améliorer l'accessibilité sera établi ;

Le SPF Mobilité et Transports, soutenu par Infrabel, la SNCB et les différentes parties prenantes, comme les entreprises de transports régionales, développeront une vision du service et de l’exploitation attendue d’ici à 2040. Cette vision sera basée sur des objectifs ambitieux en termes de part modale et visera notamment le développement d’un système intégré de transports publics.

N. Réforme institutionnelle

L'objectif est une nouvelle structure de l’Etat à partir de 2024 avec une répartition plus homogène et plus efficace des compétences dans le respect des principes de subsidiarité et de solidarité interpersonnelle.

L’Etat fédéral pourra faire usage de la possibilité d'exercer ses compétences de manière asymétrique en fonction de la Région, de la Communauté ou de la sous-région concernée.

Le Comité de concertation sera le point central de la concertation, de la coopération et de la coordination entre l'État, les Communautés et les Régions, se réunira plus régulièrement en vue d’aligner plus étroitement les politiques, dans le respect des compétences de chacun.

Le gouvernement assure que les conférences interministérielles essentielles se réuniront régulièrement et qu’il améliorera le fonctionnement des CIM, y compris la désignation des présidences.

O. Renouveau démocratique et Ethique

 La Chambre mettra en œuvre la loi sur la nouvelle initiative citoyenne, par laquelle une pétition de citoyens peut donner lieu à des propositions d’initiative législative en commission compétente de la Chambre.

Afin d'approfondir cette première série de réformes, une dynamique sera également lancée à la Chambre des représentants, impliquant les citoyens, le monde universitaire et la société civile. Les éléments suivants seront notamment abordés :

  • une plus grande implication des citoyens dans les processus décisionnels, dans le respect des principes de notre démocratie représentative ;
  • une modernisation des libertés et droits constitutionnels, sans préjudice des droits et libertés constitutionnels existants.

Le gouvernement veillera à ce que le centre pour l’égalité des chances Unia puisse pleinement jouer son rôle d’institution indépendante publique chargée de combattre la discrimination.

Un institut des droits humains performant doté d’un statut international A, sera constitué au cours de cette législature. Le gouvernement créera un institut interfédéral des droits humains disposant d’une procédure de plainte.

Le paysage constitué par les différents organes publics de promotion de l’égalité et des droits de l’Homme et les administrations concernées sera évalué. Les mesures nécessaires seront prises pour renforcer la coopération en son sein et son efficacité.

Le gouvernement chargera une équipe multidisciplinaire d'experts d'évaluer scientifiquement la législation et de la confronter à la pratique, d'identifier les lacunes de la législation et d'élaborer des propositions d'adaptation avant de prendre des initiatives législatives par consensus.

Un plan d'action pour l'accessibilité universelle sera lancé au cours de cette législature, dont le but ultime sera l'accessibilité structurelle de l'espace et des services publics. Ce plan d'action fournira, au minimum, des lignes directrices standardisées, des objectifs et un suivi de ceux-ci.

P. Europe

La Belgique soutiendra le développement du pilier social et l'initiative de la Commission européenne visant à garantir un salaire minimum dans l'UE et à développer un système européen permanent de réassurance chômage.


3. AVIS

Une volonté de travailler sur l’inclusion des personnes handicapées de manière transversale ressort de la note. Plusieurs aspects positifs pour les personnes handicapées sont évoqués. Le CSNPH tient à les souligner, mais également à les compléter et à attirer l’attention sur ce qui n’y figure pas et qui est néanmoins déterminant sur le plan de l’inclusion et de l’accès réel aux droits.

Tout d’abord, le CSNPH salue la volonté de redynamiser le Comité de concertation, de garantir que les conférences interministérielles essentielles se réuniront régulièrement, et que leur fonctionnement sera amélioré. Le CSNPH signale que la CIM Bien-être, Sport et Famille Partie « Personnes handicapées » ne s’est plus réunie depuis 2013, laissant un grand nombre de dossiers en souffrance. Parmi ceux-ci, la volonté de créer un guichet unique pour les personnes handicapées, l’élaboration d’un système performant de récolte de statistiques sur le nombre et les besoins des personnes handicapées, leur profil socio-professionnel, … pour toute la Belgique. Ces statistiques fiables sont en effet indispensables pour mener une politique cohérente et efficace pour les personnes handicapées.

Le CSNPH tient aussi à rappeler les 3 préoccupations fondamentales qui doivent sous-tendre toute politique et action :

  • soutenir la dignité de vie de la personne handicapée
  • respecter son autonomie et son choix de vie
  • renforcer sa participation à la vie en société dans tous les domaines

Le texte de la Convention sur les droits des personnes handicapées est la « bible » par excellence.

Enfin, sur le plan de la gestion politique, le CSNPH rappelle qu’aucun domaine de compétence ministériel n’échappe à la préoccupation du handicap. Il souligne le rôle de « locomotive et de veilleur » de l’actuelle ministre aux personnes handicapées pour booster cette politique de transversalité.

Il est essentiel que dans tous les domaines et dossiers susceptibles de concerner les personnes handicapées, une concertation durable et effective soit structurée avec le CSNPH de manière à progresser sur des mesures véritablement attendues par le secteur.

Il est important que cet engagement politique de transversalité soit officialisé par une décision du Conseil des Ministres. Chaque Ministre désignerait un référent handicap dans son Cabinet, point de contact privilégié de la Ministre Lalieux et du CSNPH.

Un plan d’action fédéral pour une meilleure inclusion de personnes handicapées viendra donner forme à cette volonté de transversalité.

A. Crise Covid

La crise Covid a encore augmenté en intensité les difficultés traditionnelles quotidiennes pour les personnes handicapées. La crise a aussi généré de nouveaux problèmes sérieux et portant atteinte aux droits élémentaires des personnes.

Pour la seconde vague, il faut tirer les leçons du passé. Et s’il fallait en retenir une seule : le handicap à lui seul ne peut en aucune manière être un facteur de tri pour l’accès aux urgences ou aux soins intensifs. A cet égard, le CSNPH renvoie à son avis 2020-08 et à sa news publiée le 10 avril 2020.

Ensuite, il est nécessaire de consulter les organes officiels de personnes handicapées (conseils d’avis) afin que les mesures prises aient le moins d’impact possible sur les personnes handicapées. Préserver (et développer là où elle n’existe pas) la fonction consultative est un gage de « politique pour les personnes handicapées » - voir avis 2020-10. Le secrétariat du CSNPH nécessite d’ailleurs un renforcement à minima par un collaborateur néerlandophone. 

L’accompagnement des personnes handicapées et de leurs familles est une autre préoccupation majeure. On l’a vu avec la première vague : certains services collectifs (soins, accompagnement, transports, etc.) ont été supprimés ou fortement restreints. Les personnes résidant en institutions ou en famille se sont senties les oubliées de la gestion de la crise. La presse en a d’ailleurs fait un large écho et de nombreux témoignages ont fait l’objet d’une analyse Unia. Cette réalité doit être prise en considération de manière politique et structurelle car l’exclusion des personnes handicapées et de leurs familles est constante et pas limitée aux périodes de crise.

L’information dense et suivie n’a pas suffisamment atteint les personnes handicapées par manque d’accessibilité et de lisibilité: l’Etat n’a pas recouru au langage « Facile à lire et à comprendre - easy to read »- qui sert pourtant à l’ensemble de la population ; la langue des signes a été trop peu utilisée. Le tracing ne permet pas à l’heure actuelle de contacter les personnes sourdes, sans passer par une personne ressource bien entendante. C’est un gros point d’attention à transmettre aux Régions qui gèrent le tracing.

Les règles instituées en matière de soins, de déplacement, d’accès aux commerces, etc. ont de facto exclu lourdement les personnes handicapées, sans que des aménagements n’aient été prévus– voir avis 2020-09.

A l’inverse, lorsqu’ont été prises les mesures de déconfinement, les personnes handicapées séjournant en familles ou en institutions ont été parmi les dernières à pouvoir retrouver une « vie normale ». Pénalisées par les mesures d’interdiction dans un 1er temps, les personnes handicapées ont été dans un second temps surconfinées au motif de leur handicap. Voir avis 2020-13.

Quant aux enseignements à tirer pour d’autres crises, il est impératif que le groupe de travail interfédéral et multidisciplinaire qui sera chargé d'évaluer et de mettre à jour les plans d'urgence existants prenne en compte la dimension transversale du handicap et à tout le moins les points d’attention évoqués plus haut. Il serait utile que la réflexion quant à l’accompagnement des personnes handicapées en période de crise intègre aussi l’intervention de l’armée et des pompiers, en ce compris pour prendre en charge des tâches concrètes à domicile ou dans les institutions.

La coordination est importante pour les personnes qui reçoivent des soins à domicile ; il faut une continuité dans les soins.

B. Soins de santé

Le secteur de la santé occupe une position particulière pour les personnes handicapées. Certaines personnes handicapées sont, en effet, amenées à utiliser les soins de santé de manière plus intensive que d’autres groupes de la population.

Si l’accès aux soins est un droit pour tous, le handicap est un facteur d’exclusion : les soins sont souvent trop coûteux, les hôpitaux manquent d’accessibilité, les professionnels ne sont pas formés aux besoins des personnes handicapées et les services à domicile peinent à respecter la qualité de vie des patients. Des réformes ont débuté sous cette législature mais sans aboutir : le dernier protocole actes infirmiers ne reçoit pas le soutien du secteur infirmier, plongeant dans l’exercice illégal de la médecine des milliers de familles et bénévoles de bonne volonté. Par ailleurs, cette absence de réglementation empêche la personne handicapée de travailler, de se former, d’avoir des loisirs car ce sont autant de lieux où les soins ne se font pas.  

Le CSNPH demande que le prochain gouvernement réserve une priorité absolue à plusieurs aspects liés à la santé et à la qualité des soins. Il demande de renforcer l’accès aux soins aux patients qui actuellement y renoncent par manque d’argent ou d’information. Il demande aussi de renforcer l’accessibilité des hôpitaux (note de position en préparation), l’accès à l’information et à la formation des professionnels (voir note de position cadre de soins) et enfin d’introduire effectivement la possibilité de déléguer certains actes infirmiers à des non-professionnels. Voir avis 2017-08 et avis 2017-15.

Il dénonce par ailleurs aussi les restrictions totalement discriminatoires à la logopédie notamment pour les enfants présentant un QI bas (voir avis 2016-13) ainsi que pour les patients atteints de la maladie d’Alzheimer.

Le CSNPH rappelle aussi la nécessaire transition institutionnelle que doit opérer notre modèle de prise en charge des personnes handicapées et la nécessité absolue d’assurer des soins de santé de qualité aux personnes qui font le choix de rester à domicile. Cette dimension doit nécessairement faire l’objet d’une concertation d’ampleur avec les entités fédérées - voir note de position transition institutionnelle.

L’accès et le cadre de la procédure d’indemnisation des victimes du Softénon pose également un certain nombre de questions : le CSNPH souhaite clarifier la situation avec le Ministre de la Santé et la Ministre en charge des personnes handicapées.

Le CSNPH prend note que l’objectif est de réduire, d’ici 2030, de minimum 25% les inégalités de santé entre les personnes les plus favorisées et les moins favorisées en matière d’espérance de vie en bonne santé, et de réduire le taux de mortalité évitable de 15%. C’est un point fort important pour les personnes handicapées. Il faut notamment renforcer les services collectifs à tous les stades de la vie (dès le stade de la crèche) et les rendre accessibles aux besoins des personnes handicapées. A côté de ces services, le CSNPH salue le fait qu’il existe à présent une reconnaissance légale du rôle de l’aidant proche ; cette reconnaissance doit maintenant pouvoir ouvrir un certain nombre de droits pour les aidants proches, afin de leur permettre d’accompagner au mieux la personne dépendante tout en étant eux-mêmes protégés des risques de pauvreté. Voir note de position aidants proches. Il faut que l’ensemble du secteur soit pris en compte. On songe souvent principalement aux personnes âges alors que le secteur du handicap est aussi en demande.

Le CSNPH salue également la volonté de revoir en profondeur la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la personne des malades mentaux sur la base des nouvelles connaissances dans le domaine des soins de santé et de la justice. De même, il note le développement du plan interfédéral maladies chroniques. Le CSNPH estime urgent de l’étendre aux besoins des autres personnes handicapées. Il est préalablement indispensable de dresser une cartographie des besoins dans les différents domaines de la vie. Certains relèveront bien entendu des domaines de compétences régionaux ou communautaires : il demeure important que la Ministre y soit attentive car la méconnaissance génère de lourds effets pervers et des pièges qui peuvent mettre complètement à mal une réforme fédérale, aussi louable soit-elle.

Le CSNPH rappelle qu’il doit pour ces dossiers aussi être associé au processus de réflexion et de révision.

C. Sécurité sociale

Actuellement, de nombreux domaines de compétences fédérales prennent en charge un éventail de personnes handicapées dans les régimes de sécurité sociale et de protection sociale. Le CSNPH rappelle que les allocations pour personnes handicapées relèvent d’un régime résiduaire de protection sociale. Il se veut le dernier filet de sécurité des personnes qui pour la plupart n’ont jamais ou peu travaillé en raison de leur handicap. Mais ce filet est léger : les allocations ne permettent pas de vivre dignement (pour rappel, l’ARR pour un isolé est de 20% sous le seuil de pauvreté) ni même bien souvent de faire face aux surcoûts générés par le handicap. Une réforme de la loi du 27 février 1987 est urgente (voir avis 2013-19). Par ailleurs, le CSNPH est partisan d’élargir la réflexion à la question de l’ancrage de l’allocation de remplacement de revenus (ARR) à la sécurité sociale. 

Les segmentations historiques doivent également être revisitées : l’article 100, § 1er de la loi relative à l’assurance soins de santé et indemnités, en ce qu’il est le point de basculement entre la couverture sociale et l’aide sociale doit aussi être totalement réévalué. Le CSNPH ne peut accepter que l’origine du handicap conditionne la couverture sociale de la personne : une paralysie de naissance ou suite à un accident de travail reste pour la personne une perte d’autonomie qu’elle doit compenser financièrement. Les indemnisations sont cependant fort différentes selon que la personne relève des indemnités INAMI, d’accidents de travail ou allocations pour personnes handicapées. Cette réforme devra nécessairement et longuement poser la question essentielle de la reconnaissance des besoins des personnes au-delà de leur appartenance à un statut. La couverture sociale devra au maximum couvrir l’ensemble de la population.

De nombreux aidants proches sont aussi dans cette situation : certains n’ont pu bénéficier d’une couverture sociale parce qu’ils ont dû pallier le manque de services collectifs adaptés aux besoins de leur enfant ou de leur conjoint. Cela s’est fait aux dépens de leur carrière professionnelle.

Concernant la lutte contre la fraude sociale, il faudra examiner attentivement et intégrer la réalité de terrain actuelle et qui est celle des nouvelles formes de cohabitation. Sous les précédents gouvernements, des études ont été concordantes : les formes actuelles de cohabitation ne sont pas correctement captées par les réglementations sociales. Pire, l’application de ces réglementations précipite souvent les personnes dans la pauvreté. Cette injustice explique en grande partie les tentatives de fraude. Les personnes isolées ne doivent pas pour autant être les oubliées de cette réflexion.  

D. Etat et fonction publique

Le Rapport mentionne que le gouvernement s’engage à garantir que les services publics restent accessibles à tous, y compris aux citoyens ayant peu de compétences numériques, de faibles revenus ou un handicap. Le CSNPH salue cette promesse et attire l’attention sur le fait qu’il faut tenir compte de tous les types de handicap, qu’ils soient moteurs, sensoriels ou intellectuels. Par exemple, il est nécessaire que les sites Web soient labellisés « AnySurfer », qu’ils comportent des capsules en langues des signes et des articles en FALC (facile à lire et à comprendre).

Par ailleurs, accessibilité des services publics signifie également accessibilité des bâtiments et des transports. Or, de tous les bâtiments publics appartenant à ou loué par le gouvernement fédéral et ses parastataux, aucun n’est totalement accessible aux personnes handicapées. La Finance Tower qui héberge les services de la DG HAN, est bien évidemment emblématique : voir avis 2020-05, 2020-14, 2019-02, 2018-21, 2016-08 et 2009-05.

Quant aux moyens de transports, le Rail belge n’est actuellement pas accessible: il faut préciser que le contrat de gestion SNCB ne précise pas que l’accessibilité est un critère de qualité. Le CSNPH est fort engagé dans cette lutte de services ferroviaires plus accessibles (voir notamment l’avis sur la voiture M7) : c’est aussi un enjeu pour notre société vieillissante et qui se veut plus verte.

Le CSNPH souligne très positivement l’intention de lancer un plan d'action pour l'accessibilité universelle. Le CSNPH travaille énormément sur l’accessibilité et renvoie à sa note de position accessibilité. Il publiera aussi une note de position sur l’accessibilité des hôpitaux avant la fin de cette année 2020.

Le CSNPH insiste pour que les partenaires économiques privés importants (Comeos, Febelfin, FEB, etc.) soient parties prenantes de ce plan. L’accessibilité de l’environnement est un win-win : une personne handicapée qui  rentre dans un magasin ou sur une plateforme internet, consomme et rapporte . 

Le gouvernement souhaite considérablement étendre les paiements électroniques. Le CSNPH rappelle qu’il faut tenir compte des limites rencontrées par les personnes handicapées : malvoyantes ou aveugles, atteintes de spasmes, de lésions cérébrales, etc.

Il faut aussi tenir compte du fait que de nombreuses personnes (handicapées) n’ont pas les ressources suffisantes pour accéder au numérique. D’ailleurs, le CSNPH a émis l’avis 2020-01 qui reflète clairement la situation sur l’augmentation du coût des services bancaires.

Enfin, de nombreuses personnes avec un handicap intellectuel ne disposent pas de carte de paiement. A ce titre, la suppression constante des agences bancaires et distributeurs de billets est également un problème pour les personnes handicapées (dont de nombreuses ne disposent pas de voiture).

E. Plan de relance

Le CSNPH comprend parfaitement que l’économie doit être soutenue. Il estime tout aussi important que le pilier social de notre société soit renforcé en parallèle. En effet, beaucoup de personnes handicapées et malades ne pourront pas s’accrocher au train de l’emploi. La transition écologique et numérique peut être totalement exclusive par rapport à de nombreux groupes fragilisés. Il est important que chaque politique et mesure examine la question de l’accessibilité financière et technique aux personnes handicapées et malades.

L’accessibilité de notre environnement doit aussi être pensée sur un modèle totalement inclusif. La mise en œuvre de la Directive European Accessibility Act doit être ambitieuse. D’autant qu’elle peut ouvrir sur la création de nouveaux marchés pour les sociétés en Belgique (voir avis 2016-05).

F. Lutte contre la pauvreté et accès aux droits

L’objectif européen de 2010 de sortir 20 millions de personnes, dont 380.000 personnes en Belgique, de la pauvreté vers 2020 n’a jamais été atteint. Au contraire, 200.000 nouvelles personnes, en ce compris jeunes, femmes, enfants, sont venus gonfler les rangs de la pauvreté (analysis-social-situation-and-protection-belgium-2018).

Dans un contexte peu rassurant (voir avis 2020-03 sur les recommandations principalement économiques de la Commission européenne à la Belgique), le CSNPH relève donc un ensemble d’engagements sociaux très attendus, parmi lesquels un plan pauvreté, un relèvement des allocations et une modernisation des services de la DG HAN.

Le CSNPH fait de la lutte contre la pauvreté des personnes handicapées un de ses chevaux de lance prioritaires, car le handicap conduit à la pauvreté et, à l’inverse, la pauvreté génère la maladie et le handicap (voir avis 2016-092016-062012-05). Le CSNPH rappelle ses recommandations générales reprises dans le Livre Handicap-pauvreté- 2019. Il rappelle que la concertation avec les associations qui luttent contre la pauvreté doit se faire de manière structurée et largement participative au travers de la plateforme pauvreté et que le plan d’actions interfédéral doit être une véritable planification assortie de moyens et d’indicateurs et pas un inventaire de mesures passées.

Les droits sociaux seront basés sur les revenus, mais quels revenus seront pris en compte ? Ce n’est pas parce qu’une personne handicapée dispose d’un revenu correct qu’elle ne peut pas être sujette à des coûts énormes. Il faut examiner l’ensemble du problème et faire en sorte que les personnes aient un avantage à travailler sur le plan de leurs droits sociaux. En même temps, il ne faut pas pénaliser les personnes qui ne pourront jamais travailler en raison de leur handicap ou de leur maladie.

Le CSNPH rappelle les limites de l’automatisation face au phénomène croissant du non take-up (voir avis 2018-09) et la nécessité de prévoir dans les services publics les effectifs suffisants pour rechercher les personnes qui sont sorties des radars des régimes de sécurité sociale et de protection sociale.

L’accessibilité occupe également une part non négligeable du rapport. Le gouvernement s’engage également à garantir que les services publics restent accessibles à tous, y compris aux citoyens ayant peu de compétences numériques, de faibles revenus ou un handicap. Le fonctionnement de la justice doit être rendu plus efficace, plus accessible et plus compréhensible.

G. Marché du travail

Le marché de l’emploi belge, dans son ensemble, reste profondément inéquitable. Les personnes handicapées comptent parmi les premières victimes de cette réalité : aux yeux des employeurs, le handicap prend souvent le dessus sur les compétences de la personne. Dans toutes les régions du pays, les travailleurs handicapés sont considérés comme des personnes nécessitant beaucoup (trop) d’accompagnement ; elles sont les laissés pour compte des politiques de mise à l’emploi. Et pourtant, un accompagnement spécialisé et individualisé vers l’emploi est primordial.

Le CSNPH demande de développer une réelle politique d’intégration professionnelle des personnes handicapées, qui dépasse le stade de la sensibilisation et fixe des objectifs concrets dans l’emploi ordinaire. Voir note de position. Il rappelle son opposition au projet pilote - inabouti et dépourvu de perspectives - de mise à l’emploi de 300 allocataires de la DG HAN (voir avis 2020-16).

Le CSNPH salue la volonté du gouvernement de mettre ou de remettre les personnes au travail. Les personnes non actives sur le marché du travail sont encouragées et aidées à faire le pas vers un emploi. Il s’agit notamment des personnes percevant un revenu d’intégration sociale, des malades de longue durée et des personnes porteuses d’un handicap. Les obstacles à l’emploi et au fait de travailler davantage seront également levés. Cependant, pour beaucoup de personnes handicapées, leur formation est peu qualifiante. L’accompagnement pour chercher et trouver du travail n’est pas encore assez adapté. De façon plus indirecte, le fait que les transports en commun et l’environnement ne soient pas accessibles conduit un grand nombre de personnes handicapées à devoir refuser un emploi, ou à devoir se débrouiller grâce à leur réseau familial. Il faut également attirer l’attention sur le fait que certaines personnes handicapées ne pourront jamais travailler, et ces personnes doivent pouvoir bénéficier d’un revenu décent.

Le CSNPH remarque que l'organisation et la gestion des processus de réintégration seront évaluées. Les procédures seront simplifiées et alignées afin qu'un plus grand nombre de travailleurs puissent entamer et mener à bien un processus de réintégration (plus rapidement). Ce parcours est basé sur une approche multidisciplinaire impliquant les services de l'emploi en temps utile. Cela fait depuis des années que le CSNPH demande une évaluation du processus du « back-to-work » (voir 2016-12). Le CSNPH a reçu des signaux très clairs selon lesquels, dans une grande partie des cas, la mise en œuvre de ce processus conduit au licenciement de la personne malade ou handicapée.

Le CSNPH souligne aussi la précarité du travail des personnes handicapées : certaines personnes reçoivent tout au plus des propositions de stage sans couverture sociale. Le Conseil National du travail (CNT) avait amorcé une discussion à ce propos en 2018 ; il serait nécessaire de la poursuivre et d’apporter de la clarification et de la sûreté dans les différentes formules de travail.

Le CSNPH plaide pour une affiliation à la sécurité sociale des personnes sous contrat de formation professionnelle (voir https://www.unia.be/fr/articles/oui-aux-actions-positives).

Le CSNPH souhaite que la loi Peeters « actions positives » pour les personnes handicapées dans l’emploi soit réellement appliquée et évaluée.  

Le quota de 3% pour l’emploi de personnes handicapées dans la fonction publique n’a jamais été respecté. Le CSNPH souhaite une vraie politique d’emploi, discutée à la fois au niveau fédéral et au niveau régional.

Enfin, le CSNPH insiste sur les freins de la réglementation actuelle : une personne handicapée qui perçoit des allocations n’a pas nécessairement accès au statut d’indépendant aux mêmes conditions que la personne qui ne touche pas d’allocations.

H. Entreprises publiques

En ce qui concerne bpost, le CSNPH relève que l’accessibilité des bureaux de poste et des points poste n’est pas du tout satisfaisante (voir avis 2018-03). Il demande que la préoccupation d’accessibilité sur ces lieux soit prioritaire dans le plan de mise en accessibilité universelle du gouvernement.

Bpost est un exemple forcément emblématique au même titre que Proximus. L’Etat en sa qualité d’employeur et de service public se doit de donner l’exemple et d’assurer un environnement, des produits et des services de qualité et accessibles aussi pour les personnes handicapées (voir avis 2015-22). A ce titre, il est nécessaire que ces 2 sociétés se mettent en conformité par rapport à l’accessibilité de leurs services en ligne (directive Web -voir avis 2017-14) et de leurs produits en général (Directive European Accessibility Act -voir avis 2016-05).

Toutes les entreprises publiques devraient adopter la priorité de l’accessibilité ; les contrats de gestion doivent clairement référencer ce critère.

I. Pouvoir d’achat

Un nombre important de personnes handicapées vivant en Belgique ne dispose pas de revenus suffisants pour atteindre un niveau de vie satisfaisant. L’allocation de remplacement de revenus (ARR) pour un isolé est de 20% sous le seuil de pauvreté et de près de 60% sous le salaire minimum garanti (au 01/09/2018, ARR = 910,75€ ; seuil de pauvreté = 1139€ ; salaire minimum = 1.562,59€). 40% des personnes qui perçoivent une allocation de handicap en Belgique vivent, dans les faits, sous le seuil de pauvreté et s’infligent de nombreuses privations, en ce compris dans les besoins les plus élémentaires (se nourrir, se loger, se soigner…). Voir synthèse du projet d’étude “Handilab” : Position socioéconomique des personnes handicapées et effectivité des allocations aux personnes handicapées, Leuven, 2012, p.18.

Le constat est d’autant plus cruel que vivre avec un handicap entraîne des surcoûts (dus en grande partie à un environnement inaccessible) pour la personne. Faire face aux coûts de la vie courante a un impact plus important sur le budget d’une personne handicapée que sur celui d’une personne qui ne l’est pas. En plus, elle dispose souvent d’un niveau de revenu moindre, qu’il s’agisse d’une allocation ou d’un salaire.

Dans le Rapport des formateurs, il est promis d’élever les allocations les plus basses, parmi lesquelles l’allocation de remplacement de revenus, vers le montant du seuil de pauvreté. Le CSNPH le demande depuis des années et insiste pour que cela se fasse le plus rapidement possible. Il rappelle aussi que sa revendication ultime est d’aligner les allocations sur le salaire minimum garanti, le seuil de pauvreté ne permettant malheureusement pas les personnes de vivre dignement.

Le CSNPH note également que pour les personnes en situation de handicap, le prix de l'amour et le prix du travail seront encore réduits afin de pouvoir participer pleinement à la société. C’est malheureusement insuffisant pour permettre aux personnes bénéficiaires d’allocations aux personnes handicapées de mener une vie conforme à la dignité humaine. Une réforme globale du régime des allocations pour personnes handicapées, promise depuis des années, doit être entreprise. La loi du 27 février 1987 relative aux allocations aux personnes handicapées est dépassée et pénalisante. Citons comme exemples :

  • La notion de cohabitant qui ne correspond plus aux réalités actuelles de la vie en communauté.
  • La prise en compte des revenus de l’année -2 (ou dans certains cas -1) peut dans certains cas correspondre à des situations financières qui ne sont plus celles dans lesquelles vivent les personnes handicapées.
  • Lorsque les revenus de la personne (ou de la personne avec laquelle le bénéficiaire forme un ménage) dépassent certains plafonds, l’allocation d’intégration est supprimée, alors que les frais engendrés par le handicap sont toujours présents.

Le CSNPH rappelle qu’un avant-projet de texte avait été rédigé en 2013 par le Secrétaire d’Etat et que les axes prioritaires étaient le résultat d’une intégration des attentes et recommandations du secteur.

Le CSNPH demande qu’on implique les personnes handicapées dans l’élaboration des différents tarifs sociaux existants en matière d’énergie, téléphonie, etc. Il rappelle que le tarif social est une ancienne exigence. L’implémentation d’une sorte de grille de tarifs modernisée devient urgente.

J. Justice et sécurité

L’adoption de la loi du 17 mars 2013 instaurant un nouveau statut de protection conforme à la dignité humaine fut une étape importante dans l’amélioration de l’accompagnement des personnes handicapées à une pleine citoyenneté. Il est très vite apparu que la mise en œuvre était freinée principalement par des manquements au niveau de la capacité d’action des organes chargés de la mise en œuvre de la loi. L’année 2018 a été marquée par des textes correctifs mais qui restent perfectibles.

Le CSNPH demande que le prochain gouvernement reste attentif aux demandes des personnes et des familles pour permettre une vie épanouie et inclusive la plus aboutie qui soit. Il est urgent que les juges de paix reçoivent des moyens humains pour assurer un accompagnement un peu personnalisé des personnes handicapées et de leur famille (voir avis 2018-34).

En dehors de cette évolution extrêmement importante au niveau de la reconnaissance juridique de la personne handicapée, il reste beaucoup de choses à améliorer pour permettre aux personnes handicapées d’avoir accès à la justice sur un pied d’égalité avec l’ensemble de la population.

La justice joue un rôle essentiel dans l’équilibre global de notre société. Elle reste cependant beaucoup trop lointaine pour la grande majorité des personnes handicapées : beaucoup de bâtiments ne répondent pas aux normes minimales d’accessibilité ; l’information sur les procédures est très peu compréhensible. Le CSNPH demande que l’accès à la justice soit amélioré dans des délais très courts. Les locaux et salles d’audience doivent être rendus accessibles à toute personne. De même, les informations doivent être disponibles pour tous, dans les formats qui leur conviennent.

L’ensemble des intervenants liés de près ou de loin à la justice manque souvent de la plus élémentaire connaissance de ce que sont les handicaps. Cela va de l’agent de police au juge lui-même, en passant par les huissiers, les avocats…

Le Rapport des formateurs mentionne également qu’il sera tenu compte du fait que les internés ne sont pas à leur place dans le milieu carcéral. Le CSNPH insiste pour que suffisamment de moyens soient mis à la disposition des gestionnaires et des décisionnaires pour arriver à cet objectif (voir note de position internement).

Le CSNPH rappelle enfin que le droit de vote peut être refusé par le juge au motif du handicap (voir avis 2018-34). La Belgique est en totale contradiction avec l’UNCRPD qu’elle a ratifiée.

K. Fiscalité

Beaucoup de personnes handicapées ne sont pas taxables et ne profiteront pas de la réforme fiscale. Il faut néanmoins renforcer leur pouvoir d’achat.

Les personnes pour lesquelles le handicap survient après 65 ans sont encore trop souvent discriminées sur le plan fiscal. Le CSNPH insiste pour que cette lacune disparaisse. En outre, il y a aussi la question de cohabitation lorsque l’on est âgé de +65 ans pour accéder à certaines exonérations. Enfin, le CSNPH demande également de prêter une attention particulière aux enfants handicapés qui sont aussi comptés en double fiscalement.

L. Energie

Le Rapport promet une facture énergétique abordable pour les citoyens et les entreprises.

Les personnes handicapées sont souvent locataires et se logent dans des locaux modestes et énergivores. Le green deal doit mettre en priorité l’aménagement de logements moins énergivores mais aussi plus accessibles sur le plan physique et financier pour les personnes handicapées.

M. Mobilité

Le gouvernement s’engage à accélérer le processus pour rendre les gares et les trains plus accessibles. D'ici à 2025, la SNCB veut doubler le nombre de gares intégralement accessibles, en passant de 78 à 150. Rendre toutes les gares accessibles prendra de toute façon de nombreuses années. Pour l'instant, il ne peut être question de supprimer progressivement l'assistance offerte aux personnes à mobilité réduite. Comme les véhicules moins accessibles ont également une durée de vie parfois supérieure à 30 ans, l'assistance aux personnes à mobilité réduite continuera d'être nécessaire.

Le CSNPH est d'avis que toute personne, handicapée ou non, devrait pouvoir prendre le train de façon autonome dans chaque gare et à chaque arrêt (voir nombreux avis rendus par le CSNPH).

Le CSNPH craint que les nouvelles voitures M7 ne soient pas encore totalement accessibles à tous de manière autonome. En outre, le CSNPH regrette qu'il ne soit prévu qu'un seul wagon dit accessible par composition de train. Pour les personnes handicapées qui voyagent en famille ou en groupe, une seule voiture accessible sera bientôt insuffisante. Le CSNPH est d'avis que toutes les voitures devraient être accessibles de manière indépendante (voir news 2020 : rendre le transport ferroviaire accessible).

L’exigence de réservation préalable (minimum 3h ou 24h) de l’aide dans les gares et les trains est une entrave à la liberté de circuler librement (voir avis 2017-11).

Le CSPNH demande que le système de navigation de la SNCB soit aussi accessible pour les personnes aveugles.

Enfin, le CSNPH salue la décision de soutenir l’European Disability Card (EDC), carte de mobilité européenne. L’utilisation de cette carte est un enjeu win-win pour les prestataires de services et pour les personnes handicapées. Le développement d’une accessibilité universelle pourrait aussi soutenir la promotion de l’EDC : les 2 projets pourraient utilement être gérés en parallèle.

N. Réforme institutionnelle

Le CSNPH prend note qu’à partir de 2024, une nouvelle structure de l’Etat sera envisagée avec une répartition plus homogène et plus efficace des compétences dans le respect des principes de subsidiarité et de solidarité interpersonnelle. Il insiste pour être consulté à tout niveau d’avancement des travaux. 

O. Renouveau démocratique et Ethique

Le CSNPH prend note qu’un institut des droits humains performant doté d’un statut international A, sera constitué au cours de cette législature. Le CSNPH souhaite entretenir une collaboration fructueuse et structurelle avec cet organisme.

D’après le Rapport, un plan d'action pour l'accessibilité universelle sera lancé au cours de cette législature, dont le but ultime sera l'accessibilité structurelle de l'espace et des services publics. Ce plan d'action fournira, au minimum, des lignes directrices, des objectifs et un suivi de ceux-ci. Le CSNPH salue cette initiative et espère que le CSNPH sera structurellement impliqué.

Une nouvelle fois : renforcer le rôle participatif du CSNPH avec la Ministre de tutelle et l’ensemble du gouvernement est une nécessité dans le cadre de la volonté gouvernementale de renouveau démocratique.

Enfin, il s’agit de donner les moyens pour un secrétariat capable à la fois de répondre à toutes les sollicitations et de soutenir le rôle consultatif du CSNPH.

P. Europe

Le CSNPH est ravi de lire que la Belgique soutiendra le développement du pilier social et l'initiative de la Commission européenne visant à garantir un salaire minimum dans l'UE et à développer un système européen permanent de réassurance chômage.

================

Le CSNPH a investigué ces dernières années des domaines de compétence fédérale très larges. Les avis, les notes de position et le mémorandum de 2019 détaillent un grand nombre de préoccupations : elles ne nécessitent pas forcément toutes un financement supplémentaire. Elles requièrent une politique engagée et attentive de la part des Ministres en charge de ces domaines de compétences.

Le CSNPH demandera à chaque Ministre une rencontre dans les prochaines semaines de manière à leur rappeler les priorités handicap dans leurs domaines de compétences.


4. AVIS TRANSMIS

  • Pour suite utile à Monsieur Alexander De Croo, Premier Ministre (réponse souhaitée)
  • Pour suite utile à Madame Karine Lalieux, Ministre des Pensions et de l’Intégration sociale, chargée des personnes handicapées (réponse souhaitée)
  • Pour suite utile aux ministres du gouvernement fédéral (réponse souhaitée)
  • Pour information à Unia
  • Pour information au mécanisme de coordination de l’UNCRPD