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Avis 2023/19

 

Avis n° 2023/19 du Conseil Supérieur National des Personnes Handicapées (CSNPH) relatif à l’Arrêté royal portant création d'un Conseil supérieur national des personnes handicapées, rendu en séance plénière du 15/05/2023.

Avis rendu d’initiative par le CSNPH.

 

1. AVIS DESTINÉ

  • Pour suite utile à Madame Karine Lalieux, Ministre des Pensions et de l’Intégration sociale, chargée des Personnes handicapées, de la Lutte contre la pauvreté et de Beliris
  • Pour information à Monsieur Alexander De Croo, Premier Ministre
  • Pour information à Unia
  • Pour information au Mécanisme de Coordination de l’UNCRPD
  • Pour information au Médiateur fédéral
 

2. OBJET

L’AR qui fixe la composition et le fonctionnement du CSNPH remonte à 1981 ; le règlement d’ordre intérieur (ROI) a été pour la dernière fois adapté en 2009. Ces textes doivent être adaptés, notamment à la lumière des exigences réglementaires actuelles que le CSNPH doit remplir, des enjeux participatifs qui sont attendus de lui et de la nouvelle organisation de travail qui s’est développée.

 

3. ANALYSE

Ces dernières années, un grand nombre de textes réglementaires obligent les autorités fédérales mais aussi d’autres parties prenantes à consulter le CSNPH dans des domaines les plus variés (handistreaming). Le CSNPH est aussi habilité à remettre des avis dans toutes matières fédérales lorsqu’il estime qu’une attention particulière doit être portée à la situation des personnes en situations de handicap. L’amplification des technologies ces dernières années a également eu un impact sur le fonctionnement du CSNPH (télétravail, visioconférence, etc.).
Il est essentiel que le CSNPH soit un partenaire de travail qui augmente sa réactivité et sa proactivité, qui adopte des méthodes de travail participatives et souples, qui enfin se profile comme vivier de connaissances et les transmette au mieux pour améliorer la vie des personnes en situation de handicap, leur autonomie et leur participation à la vie en société.

Le présent avis présente une série de recommandations et demande que l’AR soit amendé en tenant compte de celles-ci. Un ROI devra aussi venir compléter et clarifier le mode de fonctionnement des organes de réflexion et de décision du CSNPH ainsi que de son secrétariat. Cet avis mène une réflexion très large qui va parfois largement au-delà de la rédaction de l’AR mais qui peut en orienter le contenu (et aussi celui du ROI).

 

4. AVIS

A. Au sujet du vocabulaire et la dénomination du Conseil (AR et ROI)

Le CSNPH recommande que le nom du CSNPH soit changé en Conseil Fédéral pour les personnes en situation de handicap. En français, il est également nécessaire de changer le terme "personnes handicapées" dans l'ensemble de l’AR en "personnes en situation de handicap" (PSH). La nuance de la terminologie a son importance car l’idée est bien de souligner que la déficience est une caractéristique au même titre que le genre, l’âge, etc. et que c’est l’environnement (inadapté) qui fait de la caractéristique un handicap. C’est ce changement de paradigme qui permet de rendre juridiquement exigible la mise en adaptation de l’environnement de manière à répondre aux droits et besoins des PSH.

B. Au sujet du rattachement administratif du CSNPH – compétences ministérielles (AR)

a. Objectif : Garantir la transversalité dans toutes les compétences fédérales

b. Moyen : La vraie question à se poser : « le rattachement à quel Ministre va-t-il permettre d’assurer

    1. la garantie de la continuité et du financement
    2. la garantie de transversalité
      1. Plan Handicap fédéral à exiger dans chaque accord de gouvernement
      2. Participation aux plénières souhaitée de tous les ministres ⇒ certainement pour présenter une action, une demande d’avis.
      3. Rencontres trimestrielles entre le CSNPH et le Cabinet du Ministre en charge du Handicap ; rencontres annuelles du CSNPH avec les autres Cabinets
      4. Dans la mesure du possible pour le secrétariat du CSNPH, avis préalable obligatoire sur l’Exposé d’orientation politique du gouvernement et les notes de politique générale des ministres et secrétaires d’Etat

Le CSNPH demande à minima le rattachement administratif  à un Ministre (qui siège au Conseil des Ministres), idéalement à un vice-Premier (siégeant en Kern).
Le CSNPH recommande de rattacher le CSNPH au ministre « aux personnes handicapées », lequel doit assurer un rôle d’aiguillon.

c. Au-delà du rattachement administratif, c’est la question du fonctionnement concret du handistreaming qui se pose :

    1. réformes nécessaires du point de vue du fonctionnement du gouvernement et du parlement : test inclusion handicap pour chaque réflexion/décision
    2. La transversalité et la continuité (financière) doivent être assurées. L'aspect transversal met en évidence le fait que le CSNPH doit être impliqué, en temps opportun (= le(s) moment(s) qui permet(tent) d’intégrer l’input du CSNPH dans tous les dossiers qui peuvent avoir un impact sur les PSH ou leur environnement). Le Plan Handicap devrait exiger la prise en compte de la PSH dans chaque accord gouvernemental ; les ministres devraient être tenus d’expliquer leurs politiques en séance plénière du CSNPH ; des réunions trimestrielles devraient avoir lieu entre le CSNPH et le(s) cabinet(s).

C. Au sujet des compétences du CSNPH (AR)

a. La transversalité est le principe (articles 4.3 et 33.1 UNCRPD).

    1. L'article 1 de l'actuel AR fait référence à la loi du 8 août 1980. Il convient de faire référence à d'autres législations telles que la Constitution, l’UNCRPD,...

b. Missions

    1. Le CSNPH est l’ « interlocuteur handicap » et se prononce sur l’ accès aux droits, l’inclusion et l’autonomie ( et non pas un expert technique de l’accessibilité) à disposition du politique, de l’administration et du civil.
    2. Avis et positionnement.
    3. Proactivité (avis d’initiative) : permettre au CSNPH de se saisir de toute question de réforme nécessaire, conformément aux textes supérieurs
    4. Réactivité (avis sur demande) :
      Le CSNPH examine en opportunité les textes/domaines sur lesquels il participe à la réflexion / remet un avis. Il est donc impliqué dans tous les dispositifs légaux existants et en construction mais décide lui-même de la possibilité de rendre un avis.
      1. indicateurs : le CSNPH peut fournir des indicateurs permettant de déterminer s'il convient ou non de lui demander un avis. Les ministres concernés devraient répondre quant à la manière dont ils intègrent ou pas l'avis du CSNPH.
      2. Pour les avis à la demande d’un ministre, il devrait être expressément prévu que le Ministre réponde officiellement, avec publication éventuelle sur le site CSNPH ; ce qui représenterait le stade ultime de la démocratie participative ; chaque partenaire assume ses missions et ses responsabilités : « le CSNPH conseille, le politique tranche et explique sa décision».

D. Au sujet de la composition (AR)

a. Associations représentatives et non plus des personnes physiques : les candidats désignés sont des représentants ; c’est l’association qui est membre.

    1. Les associations respectent les critères de représentativité (voir notes de position « Participation des PSH dans les processus décisionnels (21/06/2021) » et « Représentativité et participation des PSH dans les processus décisionnels (17/10/2022) »
    2. Fixer un nombre minimum et un nombre maximum. Un minimum pour assurer la continuité, un maximum pour garantir des débats nuancés et réels.
      Suggestion : minimum 12, mais il faut respecter la représentativité de handicaps et la parité de langue. Les observateurs ne sont pas compris et ont un statut distinct.

b. Catégories de participants :

    1. Membres avec droit de vote à la plénière
      1. Associations représentatives
        Prévoir un minimum : le CSNPH doit être composé au minimum de 2/3 associations représentatives de PSH
      2. Mutuelles, centres de revalidation, ETA, prestataires de services … = Experts
      3. Unia : pour ses compétences non-discrimination, aménagements raisonnables…
    2. Sans droit de vote :
      1. experts des groupes de travail (GT) et externes : uniquement sur invitation
      2. Autres conseils d’avis
        1. Handicap : non ⇒ réunions plateformes tous les trimestres
        2. Conseil d’avis pauvreté, personnes âgées, enfants, développement durable ...
      3. Représentant DG Personnes handicapées et cabinets ministériels

c. Bureau

    1. 1 président(e) et trois vice-présidents, choisis par la/le ministre. Pas de condition de genre, de langue. Procédure de désignation dans ROI.

d. Réunions plénières – effectifs et suppléants

    1. alternance à convenir entre personnes concernées ⇒ elles assurent transmission des informations, échanges et ‘To do’
    2. effectif démissionnaire = suppléant par défaut (ROI)
    3. participation : voir plus bas dans Fonctionnement

e. Groupes de travail internes

    1. AR : Le CSNPH a la possibilité de créer des GT selon ses besoins. Attention , obligation pour chaque membre de s’engager dans les GT internes et externes
    2. ROI : participation et fonctionnement

f. Représentants d’associations :

    1. Désignés nominativement  : « l’association est représentée par X et Y »
    2. 1 effectif + 1 suppléant : formule qui permet souplesse dans les remplacements sans passer par désignation ministérielle.
    3. Respect genre ⇒ rester dans le cadre légal, mais liberté pour les associations (contraintes internes : ne pas compromettre une participation au prétexte de l’exigence « genre ») .
    4. Respect des langues
    5. équilibre entre entités : Flandre, Wallonie, Bruxelles, Communauté germanophone. Si trop déséquilibré, relancer un appel ; ce doit être respecté. Plus important que l’exigence « genre ».
    6. Formulaire de candidature : expertise et engagement à consacrer le temps nécessaire
    7. Positions prises au consensus.

g. Jetons 

    1. Défraiement aux associations pour mise à disposition du personnel (et non plus jeton à des personnes pour participation + risque de se voir étiqueté indépendant à titre complémentaire)
    2. Une suite logique des articles 4.3 et 33.1 : tout travail et toute expertise méritent salaire !
    3. Evaluer le temps nécessaire à l’exercice du mandat pour le CSNPH. Forfait mensuel ? [1]
    4. Tous frais des membres liés à la réalisation de la mission pris en charge par l’Etat : déplacement  à minima, aussi de l’aidant proche.

h. Durée du mandat

    1. Renouvelable sans limite (candidatures parfois limitées)

E. Au sujet du fonctionnement (AR et ROI)

a. Organisation actuelle inchangée : le Bureau prépare la plénière.

b. Réunions – plénière, Bureau, GT

    1. fonctionnement actuel : calendrier inchangé
      1. physique (en présentiel) et virtuel : Organisation à fixer dans ROI
      2. Plénière :
        1. Ministre en charge des PSH : toujours représenté
        2. Autres ministres : présence vivement souhaitée (actualité/avis)
    2. Participation : compromis entre efficacité et handicap/maladie
      1. Rappel : Liberté d’arrangement entre effectif et suppléant
      2. Absence sans justification : remplacement après 3 absences consécutives mais à chaque fois, attention attirée
      3. Absence pour maladie : remplacement après 6 absences/ année civile
      4. Absence de plus de 6 mois, avec justification, sont aussi remplacées
      5. Notification du remplacement à la Ministre - remplacement par le bureau notifié au Ministre (et sans arrêté ministériel de remplacement puisque c’est bien l’association qui est désignée)

c. Obligation annuelle de présenter le rapport annuel au Parlement fédéral (cfr. Unia)

d. Avis :

    1. Articles 4.3 et 33.1 de l’UNCRPD: implication du CSNPH est une obligation.
    2. Status quo pour délais (possibilité de rendre un avis dans les 2 semaines sur appréciation du CSNPH)
    3. Principe : discuter avis en plénière
    4. Exception : répondre à la demande/ à l’urgence en fonction des possibilités du secrétariat (limites au handistreaming). En tout état de cause, le CSNPH détermine lui-même les exceptions. La consultation en plénière reste essentielle. Il appartient au CSNPH de déterminer si un avis doit être rendu dans l’urgence ou non.
    5. Distinguer les avis demandés par le ministre en charge des allocations pour PSH de ceux demandés par d'autres ministres ou destinés à d'autres ministres.
    6. Portée des avis : le ministre explique les raisons pour lesquelles il s’éloigne de l’avis (voir plus haut).

e. Plan d’actions fixé annuellement

    1. Créer des GT thématiques
    2. Demander un engagement de chacun des membres selon ses compétences.

F. Au sujet du secrétariat et des moyens (AR/ROI)

a. Rattachement administratif (DG Personnes handicapées - inchangé)

b. Ancrage budgétaire structurel : personnel et outils de travail, en ce compris communication : site, FALC…

c. Aménagements nécessaires pour permettre la participation des membres aux réunions

d. Garantir indépendance et loyauté des travailleurs

e. Commun au CSNPH – BDF + Plateforme des conseils ⇒ le secrétariat doit être suffisant pour permettre aux 3 organes de fonctionner : renforcement nécessaire.

f. Secrétariat performant (recherche, analyse juridique) ⇒ un minimum de niveaux A capables de réaliser des travaux d’analyse et de rédaction dans le cadre des missions réglementaires du CSNPH/BDF

g. Secrétariat engagé

h. Equilibre entre idéal de handistreaming et charge de travail gérable

G. Sur l’urgence de la réforme

Il est expressément demandé à la Ministre chargée des personnes handicapées de procéder le plus rapidement possible aux adaptations souhaitables de manière à ce que le CSNPH continue de développer son rôle de partenaire sérieux et loyal. Idéalement, l’AR devrait être adopté et publié sous cette législature.

[1] Ligue des Usagers des Services de Santé (LUSS) et Vlaams Patiëntenplatform (VPP) : financement annuel de 761.000€ pour les 2 structures en 2023 – secrétariat d’environ 20 personnes – mandats nombreux