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Avis 2022/11

Avis n°2022/11 du Conseil Supérieur National des Personnes Handicapées (CSNPH) relatif au dispositif CityH@ndi de la DG Personnes handicapées (DG HAN) du SPF Sécurité Sociale, rendu en séance plénière du 21/02/2022.

Avis rendu d’initiative par le CSNPH.

1. AVIS DESTINÉ

  • Pour suite utile à Madame Karine Lalieux, Ministre des Pensions et de l’Intégration sociale, chargée des Personnes handicapées, de la Lutte contre la pauvreté et de Beliris
  • Pour suite utile à Monsieur Yves De Smedt, Directeur général de la DG HAN
  • Pour information à Unia
  • Pour information au Mécanisme de Coordination de l’UNCRPD
  • Pour information au Médiateur fédéral 

2. OBJET

CityH@ndi est un projet de la DG Personnes handicapées (DG HAN) du SPF Sécurité sociale qui a pour ambition de soutenir activement toutes les administrations communales et les CPAS de Belgique au niveau de l'accompagnement qu'ils fournissent aux personnes en situation de handicap. CityH@ndi fait partie du programme EXCEL HAN de la DG Personnes handicapées qui vise à améliorer une série de services qu’elle assure. 

3. ANALYSE

La DG Personnes handicapées constate une diminution des demandes introduites par les personnes en situation de handicap (PSH) via les administrations communales et les CPAS. Un grand nombre des demandes est rejeté car il manque des informations administratives ou médicales. Le non-recours au droits (non-take up) se caractérise fortement au tout début de la création de la demande. La précarisation des personnes en situation de handicap s’accroît ; le Rapport Handicap et Pauvreté explique bien cette réalité.

L’enquête électronique de la DG HAN s’est déroulée du 27 septembre au 12 novembre 2021 et comportait une dizaine de questions permettant de réaliser une cartographie de l’accueil des personnes handicapées, au troisième trimestre 2021, dans les administrations communales – en ce compris les CPAS – de Belgique.

But de cette enquête :

  • récolter des données sur l’organisation de l’accueil des personnes en situation de handicap dans la commune ;
  • connaître l’impact que la pandémie a pu avoir sur cet accueil ;
  • mettre à jour la liste des personnes de contact de la DG Personnes handicapées dans les communes ;
  • déterminer les besoins particuliers de chaque commune en matière de soutien (selon des propositions formulées par la DG Personnes handicapées).

L’enquête a récolté un taux de réponses de 82,96%. Elle a mis en évidence des attentes importantes dans 4 domaines :

  • Besoin d’une accessibilité meilleure et directe de la DG HAN pour les professionnels
  • Rôle accru de la DG en termes d’information (via son site web) et de facilitation (avec les autres institutions)
  • Lisibilité des documents (formulaires et décisions) à améliorer
  • Besoin de maintenir et accentuer le travail en réseau (DG HAN > communes et CPAS)

L’équipe CityH@ndi s’est engagée en 2022 à élaborer des plans d’actions globaux, régionaux, locaux et spécifiques auprès des communes :

  • un plan d’action global (au niveau de la Belgique)
  • des plans d’action régionaux (pour la Flandre, la Wallonie, Bruxelles et – éventuellement – la Communauté germanophone) ;
  • des plans d’action locaux (correspondant aux territoires couverts par les 11 équipes de base de la DG Personnes handicapées) ;
  • des plans d’action spécifiques (pour certaines communes en particulier, selon les résultats de l’enquête).

Le CSNPH a invité les chefs du projet à présenter le projet lors de sa réunion plénière du 17 janvier 2022.

4. AVIS

Le CSNPH souligne l’initiative de cette enquête et apprécie que la DG HAN reconnaisse finalement que le non-take up (non-recours aux droits) s’applique aussi à ses services. Depuis des années (avis 2018-09), le CSNPH dénonce cette réalité observée sur le terrain et objectivée par le Rapport Handicap et Pauvreté.

Le CSNPH insiste sur les attentes élevées de la population sur le plan d’accompagnement : cet accompagnement humain est d’autant plus important dans un contexte de digitalisation croissant et irréversible. Il est dès lors indispensable que chaque niveau de pouvoir et mandataire privé (mutuelles, centres de soins et d’accompagnement…) soit doté des moyens humains nécessaires à cet accompagnement.

Le CSNPH constate que ce projet CityH@ndi a été réalisé sur la base du constat que les mutualités n’arrivent plus à répondre au flux des demandes introduites auprès de leur permanence sociale. Le CSNPH rappelle le rôle légal et essentiel des communes et des CPAS en tant que partenaires privilégiés de proximité des citoyens dans l’accès à leurs droits. Il est clair que le risque de non-take up est élevé pour les personnes qui seraient redirigées vers d’autres organismes, sans aucune forme d’accompagnement. Le CSNPH a cru comprendre que certaines communes /CPAS se déchargent de leurs obligations réglementaires d’assurer l’introduction des demandes ; c’est bien évidemment inacceptable. Les autorités locales doivent assurer le fonctionnement des services à la population dans leur entièreté.

Sur l’enquête et ses résultats, le CSNPH souhaite apporter plusieurs points de réflexion :

  • Le CSNPH est interpellé par le taux de réaction et la diversité des attentes. Cela témoigne de plusieurs choses : importance des enjeux, souhait d’amélioration et implications des acteurs.
  • Il est un peu dommage que seuls les responsables des administrations communales, des mutuelles et des CPAS aient pu répondre à l’enquête. Il eut été intéressant que les travailleurs affectés au poste dédié pour l’accueil des demandes participent également à l’enquête. Le CSNPH pense que les agents de terrain ont également des besoins et des avis à communiquer et qui ne sont pas nécessairement les mêmes que ceux exprimés par leur hiérarchie. Les conclusions de l’enquête et les plans d’actions devront intégrer cette « lacune ». Cela n’enlève bien évidemment rien à l’importance de l’enquête.
  • Le CSNPH est aussi étonné du nombre de demandes traités en 2021 par les administrations communales et les CPAS à savoir 24,4 % ; à contrario, 32,2 % des demandes sont traitées par les mutuelles, 37,8% par les citoyens eux-mêmes et 5,5% par le SPF. Est-ce que cet état de fait est prolongé dans une réflexion administrative et politique ? Sachant bien évidement que cette statistique doit être analysée dans un contexte plus large. A titre de comparaison, peu de demandes transitent par les associations de personnes en situation de handicap ; il ne faudrait pas en tirer la conclusion que les associations ne soutiennent pas leurs membres à un moment du processus. 
  • Le CSNPH estime qu’il faut aussi prévoir des moyens et des réponses aux attentes des autres partenaires tels que les associations représentatives de personnes en situation de handicap, les centres de revalidation, les hôpitaux, les éducateurs de rue, etc. Ces secteurs sont aussi en contact régulier avec les personnes en situation de handicap et peuvent donc contribuer à la diminution du non-take up.
  • Le CSNPH rappelle aussi le taux de demandes qui n’aboutissent pas : en 2020, sur 98.092 demandes d’allocations de revenus de remplacements/allocations d’intégration (ARR/AI) (voir Rapport annuel DG HAN 2020), 15.104 demandes n’ont au final jamais été examinées par manque de suivi de la part du demandeur (Chiffres de la protection sociale - personnes handicapées). S’ajoute le non-take up lié à l’absence de toute demande et qui peut être évalué probablement à un grand nombre de demandes potentielles.
  • Il est très important que tous les travailleurs sociaux qui sont en ligne directe avec l’extérieur, à savoir les administrations et les mutuelles en particulier, aient à leur disposition un éventail d’informations et de formations nécessaires pour accomplir leur rôle. La fiabilité des informations techniques est fondamentale et est aussi un vecteur d’accès aux droits ; il y a quelques années, le projet ambassadeur avait déjà souligné le degré de satisfaction faible des mutualités par rapport aux renseignements qu’elles recevaient de la DG HAN. Les adaptations réglementaires régulières nécessitent aussi une sensibilisation permanente des autres acteurs professionnels.
  • La DG HAN a un rôle essentiel : accompagner ces organismes qui sont en quelque sorte des intermédiaires. Le CSNPH estime qu’elle doit pouvoir mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour aider les communes, mutualités, CPAS, etc. dans la gestion des demandes de personnes en situation de handicap. La DG HAN doit aussi accompagner les organismes pour qu’ils puissent mettre à disposition des demandeurs des outils et des locaux accessibles à toute personne en situation de handicap.
  • Sur les futurs plans d’action globaux, régionaux, locaux et spécifiques qui seront mis en place par l’équipe CityH@ndi, le CSNPH souhaite avoir un calendrier de développement ; le CSNPH remettra, avec beaucoup d’intérêt, son avis sur les plans d’actions attendus cette année.
  • Le CSNPH souhaite aussi insister sur le fait qu’il y a plusieurs enjeux à ne pas négliger dans ce projet : politique et financier, impact pour les personnes en situation de handicap et l’accompagnement de celles-ci lors de l’introduction de leurs demandes.
  • Le CSNPH considère cette enquête comme un baromètre, au niveau 0 ; il trouverait utile de renouveler l’exercice à intervalles réguliers.
  • Le CSNPH fait aussi le lien avec le projet « Intake Remake » (nouvelle écriture des formulaires de demande) ; les 2 projets sont liés : les formulaires de demande doivent intégrer un certain nombre de préoccupations exprimées dans le cadre de l’enquête CityH@ndi.
  • Cette enquête avait pour but aussi de mettre à jour une liste de personnes de contacts dans les différents organismes. Le CSNPH attire l’attention sur le fait que la mise à jour nécessite un suivi régulier dans le temps.