Avis 2025/11
Le secrétariat du CSNPH est actuellement en sous-effectif important.
Le 9 mai dernier, le Comité de direction du Service public fédéral Sécurité sociale a décidé que les collaborateurs qui ne travaillaient plus pour le secrétariat ne seraient pas remplacés.
Cela met le CSNPH en grande difficulté dans la réalisation des missions liées à sa fonction consultative. Très concrètement, les délais réglementaires prévus pour la remise de ses avis devront être allongés.
Avis n° 2025/11 du Conseil Supérieur National des Personnes Handicapées (CSNPH) relatif à la présentation du plan d’action contre le non-take-up (NTU) par les consultants chargés de l’étude commandée par la DG Personnes handicapées (DG HAN).
Discuté en séance plénière du 14/04/2025 et approuvé par courrier électronique du 23/04/2025.
Avis rendu d’initiative par le CSNPH.
1. AVIS DESTINÉ
- Pour suite utile à Monsieur Rob Beenders, ministre de la Protection des consommateurs, de la Lutte contre la Fraude sociale, des Personnes handicapées et de l’Égalité des chances
- Pour suite utile au Comité d’Encadrement de l’étude, Mesdames et Messieurs Peter Samyn, Julie Clément, Esther Mulkers, Véronique Bocken, Joachim Lommelen, Pablo Calvo Gil, Stéphanie Jacquet, Edouard Jacquin, Valérie Weber, Nico Meulebrouck, Natascha Van Mechelen et Arne Depoortere
- Pour suite utile à Madame Julie Clément, Directrice générale de la DG Personnes handicapées (DG HAN)
- Pour information à Madame Julie Syenave, Messieurs Stéphane Le Grand et David Van Dieren de la société de consultance Antares Consulting, chargés de l’étude
- Pour information à Unia
- Pour information au Mécanisme de Coordination de l’UNCRPD
- Pour information au Médiateur fédéral
2. OBJET
En date du 26 mars 2025 se tenait la séance de clôture de l’étude sur le non-octroi des droits ou non-take-up, commandée par la DG HAN. A cette occasion, les consultants d’Antares, chargés de l’étude, ont présenté le plan d’action final résultant du travail de réflexion accompli depuis juillet 2024.
3. ANALYSE
A. Objectifs spécifiques de l’étude
Les objectifs spécifiques de l’étude sont au nombre de cinq :
- S’accorder sur une définition du NTU ou non-octroi des droits dans le contexte du handicap
- Dresser l’inventaire des initiatives déjà mises en place par la DG HAN pour réduire le NTU
- Cartographier les interactions des personnes en situation de handicap avec les systèmes de soutien pour identifier les principaux obstacles qui renforcent le NTU
- Proposer des actions ciblées pour réduire le NTU
- Mettre au point une méthode pour évaluer l’impact des actions de la DG HAN visant à réduire le NTU.
B. Les étapes de l’étude
L’étude comportait différentes phases, accomplies entre juillet 2024 et mars 2025 :
- Une revue de la littérature pour définir le NTU et cerner ses causes, et un benchmarking des bonnes pratiques de lutte contre le non-octroi des droits.
- Une série de rencontres de terrain avec des acteurs internes et externes à la DG HAN.
- Une enquête auprès des usagers.
Sur cette base, une synthèse de la situation ‘AS IS’ a été dressée, les facteurs principaux du NTU ont été identifiés et 11 pistes de solutions ont été dégagées, comprenant une trentaine d’actions au total.
- Deux séances de travail, en janvier 2025, avec les équipes de la DG HAN et le CSNPH, afin de discuter les actions proposées.
- Analyse d’impact effectuée par les participants aux séances de travail de janvier 2025.
- Analyse de faisabilité réalisée par le top-management de la DG HAN sur la base de critères économiques, techniques, organisationnels, sociaux et culturels, politiques et des ressources disponibles (début mars 2025).
- Elaboration d’un plan constitué des actions retenues par la double analyse d’impact et de faisabilité, à réaliser entre 2025 et 2027.
Le CSNPH a suivi les différentes étapes de l’étude. Il a publié un premier avis 2024-17 alors que les résultats de l’enquête auprès des usagers n’étaient pas encore connus. Il a aussi participé à l’analyse d’impact et a explicité son appréciation dans une lettre d’accompagnement.
Le présent avis porte sur le résultat final de l’étude, à savoir le plan d’action proposé par les consultants pour lutter contre le non-octroi des droits dans le cadre des services offerts par la DG HAN.
4. AVIS
Constats
A. En ce qui concerne la priorisation des actions
Sur la triple base de la revue de littérature, de l’enquête auprès des usagers et des rencontres avec le terrain, des facteurs majeurs du NTU ont été mis en évidence. Ceux-ci ont ensuite motivé la proposition de 11 projets, composés au total de 38 actions à même de lutter contre le phénomène du non-octroi des droits. Dans un second temps, ces 38 actions ont été soumises à une analyse d’impact et de faisabilité. La combinaison des résultats de cette double analyse a abouti à l’attribution d’un score à chacune des actions proposées. Ces scores ont servi de critère pour la priorisation des actions :
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- Les actions très impactantes et très faisables ont été identifiées comme priorités 1.
- Les actions très impactantes et proches de la médiane de faisabilité ainsi que les actions très faisables et proches de la médiane d’impact ont été rangées dans les priorités 2.
- Les actions très impactantes et moins faisables, d’une part, et les actions moins impactantes et très faisables, d’autre part, ont été classées en priorités 3.
- Les actions peu impactantes et peu faisables sont devenues des priorités 4.
Le CSNPH regrette que seules les priorités 1 et 2 aient été intégrées dans le plan d’action 2025-2027. Les priorités 3 et 4 « peuvent toutefois être intégrées dans un planning à 3 ans ou ultérieurement dans un planning à plus long terme, suivant une détermination de la DG HAN » (rapport de la présentation finale du 26/3/2025, p. 30).
Par ailleurs, le CSNPH note avec surprise de nombreuses incohérences dans le traitement méthodologique de la priorisation des actions (pour la facilité de lecture : téléchargez ici le tableau Excel) :
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- Des 38 actions soumises à l’analyse d’impact, seules 34 reçoivent un score et une priorisation.
- Les 4 actions qui manquent dans le graphique des scores (actions 2.1, 2.4, 3.2 et 5.4) ne sont pas les mêmes que celles qui manquent dans la priorisation(actions 2.3, 2.4, 3.6 et 5.6).
- Trois des actions « disparues » du graphique des scores réapparaissent dans les priorités 1 (actions 2.1, 5.5) et 2 (action 3.2).
- Les actions 3, 3.6, 5.6, à score prioritaire, disparaissent de la liste des priorités.
- Des actions listées parmi les prioritaires n’apparaissent pas dans le plan d’action: c’est le cas des actions 2.1 et 5.4 (priorité 1) et 3.2 (priorité 2).
- 8 actions changent de numérotation au fur et à mesure des étapes. Avec pour effet de rendre le graphique des scores, qui ne reprend pas le libellé de chaque action, illisible puisqu’on ne sait plus à quelle action la numérotation renvoie.
- Au total, ce sont 14 actions dont l’évaluation et la priorisation sont totalement inintelligibles et opaques, soit plus d’un tiers du total des actions.
B. À propos de la cohérence du plan d’action par rapport aux résultats de l’enquête menée auprès des usagers
L’enquête auprès des usagers a été diffusée entre le 12 septembre et le 18 octobre 2024 pour les versions française et néerlandaise ; entre le 27 septembre et le 18 octobre 2024 pour la version allemande ; en format digital essentiellement. Le but de l’enquête était d’identifier des ayants droit en situation de NTU, de détecter des causes de non-recours pour chaque service de la DG HAN et de récolter des retours d’expérience des bénéficiaires afin d’améliorer les services.
Parmi les résultats principaux de l’enquête, citons :
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- Les personnes en situation de handicap psychique sont plus touchées par le NTU que les autres populations parmi les répondants de l’enquête.
- Les typologies de NTU varient fortement en fonction de la province de résidence, et donc du centre de reconnaissance dont relèvent les bénéficiaires.
- Quel que soit le type de handicap étudié, un quart des répondants signale avoir rencontré des problèmes administratifs, à savoir : « je ne savais pas que j’avais droit à ce service », « j’ai eu des problèmes à trouver les informations dont j’avais besoin », « j’ai eu des problèmes à utiliser le site internet de la DG HAN/My Handicap », « les informations n’étaient pas accessibles (pas de documents en braille, langue des signes, format audio, langage simplifié etc.) ».
- Pour les 4 services proposés par la DG HAN (reconnaissance du handicap, allocation d’intégration, allocation de remplacement de revenu et carte de stationnement), les mêmes obstacles sont avancés par les usagers : « je ne savais pas que j’avais droit à ce service », « je trouvais les démarches trop difficiles ou décourageantes », « j’ai eu des problèmes à trouver les informations dont j’avais besoin ».
- Tous services de la DG HAN confondus, près de 10% des répondants déclarent avoir manqué de soutien pour remplir les formulaires et accomplir les démarches requises.
- Dans le champ libre offert aux répondants pour proposer des améliorations à la DG HAN, on note parmi d’autres suggestions :
- Une meilleure diffusion des informations, à travers des campagnes ciblées, des brochures et une communication proactive
- Un interlocuteur unique pour offrir un accompagnement humain et éviter aux bénéficiaires la sensation d’être abandonnés
- La compatibilité des sites avec les lecteurs d’écrans pour les handicaps visuels
- La mise en place de systèmes de téléphonie adaptés aux handicaps visuels et auditifs
- Des supports visuels, en langues des signes et en FALC
- Une assistance personnalisée
Le CSNPH s’étonne que les demandes listées ci-dessus trouvent peu d’échos dans le plan d’action alors même que l’objectif de l’enquête était de détecter des causes de non-recours aux droits et d’améliorer en retour les services de la DG HAN. Le CSNPH remarque de fait que plusieurs actions qui répondent aux besoins formulés par les usagers ont été reléguées au rang de priorités 3 et 4, et donc exclues du plan d’action :
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- La sensibilisation des parties prenantes externes (action 2.1) est une manière efficace d’augmenter les compétences en matière de droits de la première ligne et, par conséquent, d’améliorer l’information que reçoivent les potentiels bénéficiaires de la part ces parties prenantes. C’est aussi une façon d’élever la qualité des formulaires complétés par la première ligne et de diminuer les demandes incomplètes ou non valides. Le temps, récupéré ici par la DG HAN, pourrait être réinvesti, avec profit, dans l’accompagnement personnalisé des ayants droit et répondre au besoin de soutien formulé par une grande part des répondants dans l’enquête auprès des usagers. Cette action fait partie, par ailleurs, des actions listées comme priorités 1 inexplicablement exclues du plan d’action.
- La sensibilisation, à la fin de leurs études, des futurs professionnels susceptibles d’entrer en contact avec de potentiels ayants droit (action 3.6 répertoriée par la suite 3.5) permettrait également d’améliorer les connaissances de ces futurs professionnels en matière de droits et, partant, la qualité des informations qu’ils diffuseront lorsqu’ils seront au contact de leurs publics.
- Le référent unique (action 5.3) est une demande explicite des usagers (voir ci-dessus) et répond au manque d’accompagnement humain personnalisé dans les démarches, que l’enquête a mis en avant comme un frein majeur pour l’accès aux droits.
- Le contact local avec les publics difficilement accessibles (action 5.4) est l’une des rares actions parmi les 38 proposées à s’attaquer valablement au NTU primaire et total puisqu’elle vise à s’approcher des publics éloignés de la DG HAN. Cette action identifie explicitement les malades psychiatriques et les sans-abris, parmi lesquels se trouvent des personnes en situation de handicap psychique, un public davantage touché par le NTU d’après l’enquête auprès des usagers. Il est d’autant plus regrettable que cette action, qui faisait partie des priorités 1, ne se retrouve pas dans le plan d’action 2025-2027. S’agit-il de reporter la priorité à après 2027 ? Rien dans le rapport ne le laisse penser. Et quand bien même ce serait le cas, cette action arriverait beaucoup trop tard.
- L’accompagnement rapproché des bénéficiaires (action 5.6 répertoriée par la suite 5.5) répond directement à la demande des bénéficiaires et, en particulier, des personnes en situation de handicap intellectuel qui ont participé à l’enquête.
- Les supports alternatifs d’information (action 6.1) sont une réponse concrète aux besoins, relayés par l’enquête, de plusieurs types de handicap de disposer de supports d’information accessibles : papier, braille, format visuel et audio, langues des signes, FALC. Cette action permettrait en outre de mettre la DG HAN en conformité avec l’article 21 de la Convention des Nations-Unies relative aux droits des personnes en situation de handicap qui précise que « les États Parties communiquent les informations destinées au grand public aux personnes handicapées (…) sous des formes accessibles et au moyen de technologies adaptées aux différents types de handicap ».
- L’identification proactive des bénéficiaires (action 7.1) est une action décisive pour combattre l’ignorance de leurs droits par les bénéficiaires, facteur majeur du NTU selon l’enquête et qui cantonne les ayants droits à l’inaction faute de savoir ce qu’ils peuvent demander.
- Rendre My Handicap accessible à d’autres acteurs externes (action 10.3) permettrait d’augmenter les personnes ressources et le soutien demandé par les répondants de l’enquête, notamment pour les accompagner dans leurs démarches et le remplissage des formulaires. Cette action nécessite toutefois, aux yeux du CSNPH, que les nouveaux partenaires aient les connaissances indispensables pour remplir leur rôle et est conditionnée à la mise en place préalable de l’action 3.4 (devenue par la suite 3.3).
Enfin, le CSNPH constate avec surprise que le plan d’action ne reprend aucune action pour limiter l’impact de la fracture numérique : le projet 6 qui devait lui être consacré n’est pas repris, pas même partiellement, dans le plan d’action 2025-2027. La digitalisation et la fracture numérique constituent pourtant un facteur majeur du non-octroi des droits, comme le rappellent aussi bien la revue de littérature de l’étude commandée par la DG HAN que la note de position de 2022 du CSNPH consacrée aux conséquences de la digitalisation. Cette note de position relaie entre autres une étude de la Fondation Roi Baudouin selon laquelle 40% des Belges courent le risque d’être en situation d’exclusion numérique et 32% ont de faibles compétences en matière numérique.
Les résultats de l’enquête auprès des usagers semblent diverger des chiffres publiés par la Fondation Roi Baudouin puisque, d’après l’enquête, seuls 7% des répondants ont des problèmes d’accès à la technologie. Cette divergence n’est toutefois qu’apparente et est due à un biais d’interprétation des résultats de l’enquête. En effet, les répondants avaient la possibilité de cocher jusqu’à 4 problèmes pouvant mener à des situations de NTU. Pour des raisons d’élaboration des données statistiques, ces différents problèmes ont été regroupés en « familles » :
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- La famille « Accès à la technologie » ne comprend qu’un seul item : ‘je n’ai pas internet’
- L’item ‘j’ai eu des problèmes à utiliser le site internet de la DG HAN’ a été rangé dans la famille « Accès à l’information »
- L’item ‘j’ai des problèmes à utiliser MyHandicap’ fait également partie de la famille « Accès à l’information ».
Les 7% des répondants de l’enquête qui ont des problèmes d’accès à la technologie sont donc exclusivement ceux qui n’ont pas internet. Ce chiffre est d’ailleurs supérieur à celui établi par le dernier baromètre de l’inclusion numérique de la Fondation Roi Baudouin, qui évalue à 5% la part de la population belge privée d’internet. Ce qui montre que le public cible de la DG HAN est davantage à risque que la moyenne des Belges. Pour déterminer ensuite le pourcentage de la population à risque d’exclusion numérique, il faut encore ajouter aux personnes qui n’ont pas internet celles qui ont de faibles compétences numériques. Cette frange de la population, qui bien que possédant internet rencontre des problèmes avec l’utilisation des outils en ligne, apparaît très clairement dans l’enquête parmi les répondants qui ont coché ‘j’ai eu des problèmes à utiliser le site internet de la DG HAN’ et ‘j’ai des problèmes à utiliser MyHandicap’. Ils ne sont cependant pas classés dans la famille « accès à la technologie » mais dans la famille « accès à l’information ». Et l’« accès à l’information » est précisément l’un des principaux facteurs de NTU mis en évidence par l’enquête. En outre, la fracture numérique réapparaît encore explicitement dans l’enquête à travers les questions ouvertes :
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- Parmi les problèmes menant au NTU, les répondants citent spontanément l’accès limité aux outils numériques.
- Dans les propositions d’amélioration formulées librement par les répondants, on trouve l’accessibilité aux outils numériques et l’amélioration de la plateforme en ligne.
Ce constat important de l’enquête auprès des usagers n’est malheureusement pas suivi d’effet puisque le plan d’action 2025-2027 ne reprend aucune des actions proposées pour lutter contre la fracture numérique.
C. Pour ce qui regarde le précédent avis rendu par le CSNPH
Le CSNPH rappelle l’avis 2024-17 qu’il a publié à mi-parcours de l’étude NTU commandée par la DG HAN et regrette que les améliorations qu’il y prônait n’aient pas été prises en compte pour l’analyse d’impact et de faisabilité. Les suggestions qui s’y trouvent auraient pu venir enrichir le plan d’action et/ou offrir des alternatives à certaines actions jugées impactantes mais trop chronophages.
Parmi les actions mises en avant par le CSNPH, citons :
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- Donner l’information la plus complète et la plus précise possible aux usagers sur les possibilités de recours.
- Offrir une information lisible, en « langage clair », en « facile à lire et à comprendre » (FALC), en Braille, en langues des signes, avec des supports audiovisuels sous-titrés.
- Fournir une information ciblée sur la période de vie dans laquelle se trouve la personne: quels droits pour un enfant en situation de handicap concernant l’école ? les loisirs ? les transports ? impact des transitions sur les différentes allocations et statuts ? Etc.
- Assurer une communication transparente sur les montants perçus et à recevoir.
- Renforcer l’accessibilité des lieux.
- Mise sur pied, au sein de la DG HAN, d’un système de contrôle interne pour éviter que des dossiers où les conditions n’ont pas changé, voire se sont dégradées, ne fassent l’objet d’importantes dépréciations, qui peuvent, dans certains cas, atteindre 3 points ou plus.
- Mise en place d’une courte enquête de satisfaction après les consultations afin d’examiner les mauvaises expériences vécues, détecter d’éventuels dysfonctionnements et procéder ensuite aux ajustements nécessaires. Cette pratique, par extension, pourrait être appliquée à l'ensemble du front office de la DG HAN.
- Utilisation, pour le traitement des dossiers personnels, d’algorithmes performants, avec un monitoring systématique afin d’en mesurer le fonctionnement correct et dans le but d’implémenter les nécessaires ajustements dès lors que des anomalies de traitement sont détectées. A cet effet, les dossiers rejetés, ainsi que les données qui ont conduit au rejet, devraient être conservés.
- Collecte de données précises chiffrées qui permettront de mesurer l’efficacité des politiques sociales, notamment en matière de NTU.
- Préservation des guichets et interlocuteurs humains afin d’offrir un accompagnement personnalisé et instantané.
- Mise en place de guichets ou points de contact uniques.
- Favoriser les visites à domicile des travailleurs sociaux afin de permettre une vision holistique des besoins de la personne en situation de handicap.
- Respect de la directive européenne sur l’accessibilité web qui impose aux organisations du secteur public d’appliquer la norme européenne EN 301 549 à leurs sites web et outils en ligne, et notamment les principes de perceptibilité, d’utilisabilité, de compréhensibilité et de robustesse.
- Mise en œuvre inclusive et accessible des outils basés sur l’intelligence artificielle avec une attention pointue consacrée aux biais, discriminations indues et à l’opacité des décisions qui rendent les contestations difficiles.
D. Au sujet de la cohérence du plan d’action par rapport aux objectifs de l’étude
Le CSNPH constate que les objectifs de l’étude – en particulier, comprendre les causes du NTU et proposer des actions ciblées – n’ont été que très partiellement atteints. Le CSNPH en veut pour preuve l’absence d’actions destinées à lutter contre la fracture numérique ou de réponses à plusieurs des besoins exprimés par les usagers dans l’enquête menée en automne 2024.
Le CSNPH regrette qu’une méthodologie essentiellement mathématique, basée sur des scores, ait été adoptée pour constituer le plan d’action. Le CSNPH déplore que cette dernière n’ait pas été pour le moins couplée à une approche qualitative fondée sur les contenus et les objectifs. Cela aurait permis de laisser tomber des actions très faisables et moins impactantes pour repêcher des actions moins faisables certes mais à haute valeur ajoutée pour lutter contre le non-octroi des droits. La lutte contre la fracture numérique en est un exemple flagrant.
Souhaits concrets
Le CSNH demande :
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- Que soient intégrées au plan 2025-2027 :
- les actions avec une priorité 1 : 2.1 (Sensibilisation des parties prenantes externes) et 5.4 (Contact local avec les publics difficilement atteignables).
- des actions destinées à lutter contre la fracture numérique, à tout le moins l’action 6.1 (Supports d’information alternatifs) car c’est un besoin démontré par l’enquête auprès des usagers et un droit sanctionné par la Convention des Nations-Unies relative aux droits des personnes en situation de handicap.
- Que soient repêchées pour le plan 2025-2027 ou à minima dans le cadre d’une planification ultérieure à 2027 les actions 3.6 (Formation des professionnels en fin d’étude), 5.3 (Référent unique), 5.6 (Accompagnement rapproché des bénéficiaires), 7.1 (Identification proactive des bénéficiaires) et 10.3 (Faciliter l’accès à My Handicap Professional à d’autres acteurs externes). Parce qu’elles font partie des demandes formulées explicitement dans l’enquête par les usagers et/ou parce qu’elles permettent d’accroître le soutien humain personnalisé de première ligne.
- Que les collaborateurs de la DG HAN chargés de s’attaquer au NTU soient évalués aussi sur cet objectif au départ d’indicateurs très clairs. C’était une proposition formulée par le groupe néerlandophone lors des sessions de travail du mois de janvier 2025.
- Que soient intégrées au plan 2025-2027 :
Enfin, le CSNPH demande que soient pris en considération certains points d’attention dans la mise en œuvre d’actions inscrites au plan d’action 2025-2027 :
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- Pour le re-contact des abandons (action 1.2), il est prévu d’automatiser ce processus à plus long terme, « à travers les outils numériques de la DG HAN en injectant la liste des abandons dans TETRA et d’automatiser un envoi de lettre type vers l’ayant droit » (plan d’action, p. 19). Cette automatisation ne répond pas au besoin de suivi personnalisé des ayants droits et pas non plus aux défis de la facture numérique si ces lettres devaient être envoyées sous forme digitale.
- En ce qui concerne le renforcement de la compréhension par les ayants droit du processus d’évaluation (action 2.3 devenue 2.2 dans le plan d’action), il est prévu d’intégrer des explications sur le site internet et sur les écrans des centres de reconnaissance du handicap. Le CSNPH insiste sur le fait que la digitalisation ne peut pas être la manière de renforcer la communication de la DG HAN et ses bénéficiaires, eu égard à la fracture numérique qui touche un grand nombre d’entre eux, en proportion plus importante que la moyenne belge.
- La mise à disposition de webinaires de manière permanente sur le site de la DG HAN (action 3.3 devenue 3.2 dans le plan d’action) ne constitue pas, aux yeux du CSNPH, une bonne manière de diffuser l’information. Ils sont énergivores pour les personnes à la recherche de renseignements (il faut les regarder en entier) et leur mise à jour, nécessaire en cas de changement dans la législation, est lourde car elle nécessite de les remplacer entièrement.
- La clarification des rôles de chaque institution et de chaque partenaire pour une meilleure collaboration avec la DG HAN (action 10.3) suppose que les partenaires externes reçoivent les moyens nécessaires pour endosser les rôles qui leur sont attribués. Si de nouveaux moyens doivent être débloqués, ce doit être au bénéfice de la DG HAN et des missions que la réglementation lui confère.
- Le partage des informations et des données des ayants droits entre les instances (action 10.4) suppose impérativement la mise en place de garde-fous pour garantir et protéger la vie privée.
Le CSNPH insiste avec force sur l’intérêt de la présente étude concernant la lutte contre le NTU. L’enquête auprès des usagers a mis en évidence des attentes, factuelles et réalistes, qui appellent maintenant des réponses administratives et politiques. A ce stade des réflexions, il est important d’aller au bout des améliorations nécessaires. Un nombre impressionnant de personnes ont participé à l’enquête (plus de 3.000) ; c’est inédit et révélateur de l’ampleur des expectatives des personnes en situation de handicap et de leur espoir de voir mises en place des solutions pour faire progresser leur accès aux droits. Tous ces répondants sont en attente de retours concrets leur démontrant qu’ils ont été entendus.
Cette étude constitue, en effet, aux yeux du CSNPH, un précédent inédit. Elle fournit une photographie précise du phénomène de non-octroi des droits. A travers ce projet, le SPF Sécurité Sociale a mis en évidence un enjeu de société qui touche directement les personnes en situation de handicap et, plus généralement, l’ensemble des citoyens. Mener l’exercice jusqu’au bout, en mettant en chantier les améliorations nécessaires des services de la DG HAN, devrait être source d’espoir pour les personnes en situation de handicap et d’inspiration pour l’ensemble des services publics.
Les deux sessions de travail du mois de janvier 2025 ont par ailleurs lancé une dynamique constructive de réflexion, sans tabou et « orientée actions ». Cette dynamique constitue une base inestimable à partir de laquelle il est désormais possible de construire. Il est toutefois regrettable qu’en raison du temps trop limité alloué à ces discussions cruciales, une toute petite partie des actions seulement ait pu être abordée.
C’est pourquoi le CSNPH regrette d’autant plus la piètre qualité du rapport final relatif au plan d’action. Toutefois, eu égard à l’importance des enjeux sociaux et humains du non-octroi des droits, le CSNPH insiste sur la nécessaire mise en chantier des recommandations de l’étude, moyennant les remarques formulées au point D du présent avis. Le CSNPH espère que cette mise en œuvre de mesures effectives sera à la hauteur des besoins et des espoirs des personnes en situation de handicap. C’est également dans cet esprit que le CSNPH demande que la priorisation actuelle soit réexaminée à la lumière des enjeux du NTU (voir point B).
Le présent avis est rendu sur la base des documents reçus par mail le 01/04/2024, sous réserve d’autres documents ou corrections qui seraient transmis au CSNPH par la suite et qui auraient pour effet de modifier le contenu du rapport final et/ou du plan d’action.