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Avis 2019/01

Update : le projet de loi qui a fait l’objet de l’avis 2019-01 du CSNPH a été adopté et publié (Loi du 5 mai 2019 relative à l'octroi d'une somme forfaitaire en faveur des personnes atteintes de malformations congénitales dues à l'ingestion par leur mère pendant la grossesse de médicaments contenant de la thalidomide, M.B. 16.05.2019).

Avis n° 2019/01 du Conseil Supérieur National des Personnes Handicapées (CSNPH) relatif à l’ avant-projet de loi relatif à l’octroi d’une somme forfaitaire en faveur des personnes atteintes de malformations congénitales dues à l’ingestion par leur mère pendant la grossesse de médicaments contenant de la thalidomide.

Avis rendu à la demande du Ministre Kris Peeters, en date du 1er février 2019, pris en urgence suite à une consultation électronique des membres en date du 6 février 2019.

1. OBJET

La ministre De Block proposera le 15 février 2019 en conseil des Ministres une loi dédommageant les patients atteintes par le Softénon.

2. ANALYSE

Le texte proposé est le résultat d’une longue mobilisation du Parlement européen, de collectifs de patients sur l’ensemble de l’Europe et d’une condamnation de l’Etat belge en 2018. Pour rappel, la substance chimique dénommée thalidomide a entraîné le décès et/ou la malformation de milliers de nouveau-nés dans de nombreux pays européens, en ce compris la Belgique.

Le projet de loi définit les modalités d’octroi d’une somme forfaitaire en faveur de chaque personne atteinte de malformations congénitales dues à l’ingestion par sa mère pendant la grossesse de médicaments contenant de la thalidomide ou, en cas de prédécès de la victime, à sa mère et à son père.

La somme forfaitaire de 125.000 euros par patient qui est prévue est exonérée de l'impôt sur le revenu des personnes physiques et n’affecte par ailleurs pas les droits que les personnes concernées peuvent faire valoir en vertu d'autres dispositions.

Une somme forfaitaire de 30.000 euros est octroyée à la mère et au père, encore en vie à la date d’entrée en vigueur de la loi, de la personne visée à l’article 2 décédée avant l’entrée en vigueur de la loi.

La compétence en matière d’instruction est attribuée à la Caisse Auxiliaire d’Assurance Maladie-Invalidité (CAAMI).

3. AVIS

Le CSNPH salue l’initiative de la Ministre. Elle est tardive par rapport au long combat des victimes mais elle a le mérite de reconnaître les ravages générés au plus profond des patients et de leur famille.

Sur la portée et le contenu de la loi, le CSNPH exprime les remarques suivantes :

  • Montants provisionnés : le nombre de patients survivants est évalué à 50 ; le nombre de parents survivants à des patients prédécédés est évalué à 50. A raison d’une indemnisation de 125.000 €/ patient et de 30.000€/parent, les 5 millions permettraient tout au plus à indemniser 40 patients . Une nouvelle provision devrait être rapidement budgétée ; est-ce qu’une nouvelle initiative législative sera nécessaire ?
  • Preuve à rapporter : comment patients et parents pourront-ils rapporter le preuve de l’origine de leur handicap ? A l’époque, l’archivage des dossiers médicaux était fort aléatoire et incomplet.
  • Instruction des demandes : Le régime parait reposer sur le principe du « premier demandeur, premier instruit » sans forme de priorisation entre la nature des demandeurs (patients ou parents), l’importance du degré de dépendance, … ; comment sera assuré un traitement égalitaire entre tous les patients/parents devant la loi si l’on fonctionne dans le cadre d’une enveloppe fermée ?
  • La loi s’adresse aux personnes belges ou nées en Belgique. Comment retrouver tous les bénéficiaires (patients vivants et parents survivants ) ? Comment se fera la communication en Belgique et à l’étranger ?
  • Pourquoi limiter l’indemnisation au père et la mère ? On peut imaginer l’absence de l’un ou l’autre parent ou à contrario l’investissement d’un autre membre de la famille.
  • Les conséquences liées à l’ingestion du médicament sont très variables sur le plan de la dépendance des personnes, avec des frais de soins et d’assistance aussi très variables. Le principe d’une somme forfaitaire interpelle par rapport au souhait d’indemniser les victimes d’une manière équitable. Il est difficilement entendable qu’on ne tienne pas compte des besoins spécifiques et des frais réellement exposés précisément en raison du handicap. C’est tout le débat entre l’égalité et l’équité.
  • Un recours est-il possible contre la décision de la CAAMI ?
  • Il est prévu que l’indemnisation ne sera pas imposable ; dans quelle mesure sera-t-il tenu compte de l’indemnisation au titre de « ressource » dans le calcul d’un autre droit ou d’une aide, pour le patient ou le parent (voir le problème cumul Aide sociale et allocation d’intégration (AI) ; l’AI n’est pas un revenu au niveau fiscal et pourtant certains CPAS en tiennent compte). ?
  • Article 9§2 : ….n'affecte pas les montants auxquels les personnes … ; il faudrait rajouter « soins , aides matérielles , assistance humaine, technique ou de tout autre nature »

4. TRANSMIS

  • Pour suivi à Monsieur Kris Peeters, Ministre chargé des Personnes Handicapées et à Madame Maggy De Block, Ministre de la Santé ;
  • Pour information au Premier Ministre ;
  • Pour information à UNIA ;
  • Pour information au mécanisme de coordination interfédéral.